De l’aube des « Japonismes 2018 » au Tandem Paris-Tokyo : 160 ans de relations France-Japon

Le critique d’art et collectionneur d’art japonais Philippe Burty a été le premier à utiliser le mot « japonisme en 1872. Mais bien plus tôt, à la fin de l’époque d’Edo, entre les années 1840 et l’Exposition universelle de Paris de 1867 où le Japon s’expose pour la première fois, de magnifiques objets d’artisanat d’art étaient déjà arrivés en France par l’intermédiaire de marchands hollandais et chinois. C’était L‘aube du Japonisme…

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Peinture d’une lanterne à Kabayachô, lavis de couleur, non signé [attribué à Katsushika Hokusai], XIXe siècle © BNF, DÉPARTEMENT DES MANUSCRITS

« Dans les dernières années, publications et expositions ont célébré le japonisme. Le propos de l’exposition L‘aube du Japonisme (jusqu’au 20 janvier 2018 à la Maison des cultures du Japon à Paris, Métro Bir Hakeim) est de montrer, avec 111 pièces, qu’avant la première participation officielle du Japon à une Exposition universelle – à Paris en 1867 –, la connaissance de la France par le Japon de l’époque d’Edo, et réciproquement, existait par la circulation des objets.Bien avant le Traité de commerce et d’amitié de 1858, quelques années après l’ouverture forcée du Japon par le commodore Perry. »

Geneviève Lacambre Commissaire de l’exposition, Conservateur général honoraire du patrimoine.

C’est précisément ce Traité de commerce et d’amitié de 1858 qui sera fêté en 2018.

De l’été 2018 à l’hiver 2019, à l’occasion des 160 ans du traité d’amitié et de commerce entre la France et le Japon, aura lieu « Japonismes 2018 ». Cet événement regroupera une série de manifestations consacrées à la culture japonaise, de l’époque Jômon à la période contemporaine, à Paris et en province.

En confrontant directement le public français à des facettes de la culture japonaise qui n’avaient, jusqu’à présent, pas toujours été suffisamment montrées ou bien comprises, Japonismes 2018 espère bien mettre en résonance les âmes des Français et des Japonais.

Le programme le plus abouti à ce jour se trouvera sur un autre site, riche de nombreuses autres ressources :

« 2018, la très grande année franco-japonaise » http://ccfjt.com/meiji150eme/

et la page FB du site de la CCFJT

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Il y a aussi bien des possibles dans le cadre du

TANDEM PARIS-TOKYO 2018
Après Buenos Aires, Berlin, Dakar, Rome, Londres, New York et  Madrid, Tokyo est à l’honneur à Paris avec le Tandem Paris-Tokyo.
Le Tandem culturel fera découvrir aux Parisiens et Tokyoïtes une programmation culturelle croisée durant 2018.
Paris accueille ainsi, dès le mois de février, une quinzaine d’événements (expositions, installations, spectacles, concerts etc.) mettant à l’honneur la vitalité de la scène culturelle Tokyoïte.
Le Tandem Paris-Tokyo est mis en œuvre par la ville de Paris, le Gouvernement métropolitain de Tokyo et l’Institut français, en partenariat avec l’ambassade de France au Japon.
Programme des événements du Tandem Paris-Tokyo :
Un bel exemple :
La Ville de Paris et le Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême présentent un événement consacré à l’art du manga du célèbre auteur Naoki Urasawa, dans le cadre du Tandem Paris – Tokyo 2018. Gratuit et ouvert à tous, L’Art de Naoki Urasawa sera exposé du 13 février au 31 mars 2018 à…
Paris Rendez-vous
(le « concept-store » de l’Hôtel de Ville)

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L’ART DE NAOKI URASAWA
Né en 1960, Naoki Urasawa est le maître incontestable du manga de genre pour adultes. Les séries 20th Century Boys, Monster, Pluto, Master Keaton ou plus récemment Billy Bat sont régulièrement saluées pour le souffle épique de leur mise en scène, leur sens aiguisé du suspense et leur vaste galerie de personnages aux physiques très singuliers et aux visages  très expressifs.
Dans ses mangas, Naoki Urasawa installe en effet des atmosphères étouffantes et fascinantes, quelque part entre Alfred Hitchcock et Brian De Palma, entraînant les lecteurs dans des polars labyrinthiques, teintés de SF et habités d’une douce mélancolie…
Urasawa s’inspire autant de sa vie que de l’actualité qu’il transfigure, notamment dans sa série la plus fameuse, 20th Century Boys, qui reprend l’histoire de la secte Aum, dont l’influence a profondément marqué les Japonais dans les années 1990, et qui nourrit les angoisses liées à l’Apocalypse et à la rédemption de l’âme humaine.
Cet événement rétrospectif présente 500 planches originales, et revient sur les motifs de l’œuvre : l’obsession d’un mal sans visage et sans nom, l’art comme forme supérieure d’aspiration humaine, le dialogue entre l’Orient et l’Occident, ou encore la crainte de la résurgence de dictatures sanguinaires.
Naoki Urasawa est aimé des lecteurs comme des créateurs occidentaux. Dans les années 1970, il découvre Métal Hurlant et voue dès lors un culte à Jean Giraud, qu’il considère sans égal.
Utilisation du vide, finesse du trait, choix des textures : toute l’originalité graphique de Moebius marque profondément Urasawa. Il devient l’un des premiers auteurs japonais à revendiquer l’influence de la bande dessinée franco-belge.
Avant de prendre ses quartiers dans la capitale, L’Art de Naoki Urasawa, exposé en France pour la première fois au Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême du 25 au 28 janvier, a été un énorme succès.
Primé à deux reprises à Angoulême (Prix de la Meilleure série en 2004 pour 20th Century Boys, Prix Intergénérations en 2011 pour Pluto), Naoki Urasawa vient de recevoir, lors de l’édition 2018 du Festival, un Fauve d’honneur d’Angoulême ainsi qu’un Fauve d’honneur Polar SNCF.
via : Mairie de Paris

L’Aube du Japonisme =============================

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Nécessaire à pique-nique, Musées d’art et d’histoire de La Rochelle ©C Chassé MAH-1871-6-25

Flashback japonisant

Des hommes de lettres aussi influents que Baudelaire et les frères Goncourt admirèrent les « japoneries », ou « japonaiseries », qui faisaient sensation. Ces objets suscitant l’émerveillement commencèrent à influencer l’art et les arts décoratifs occidentaux.

Une vingtaine d’années avant la signature du traité d’amitié et de commerce entre la France et le Japon, les Français découvrirent grâce à ces œuvres l’importance de la nature ainsi que l’audace et l’originalité des compositions dans les estampes et les objets artisanaux du Japon, et se passionnèrent pour la culture de ce pays lointain.

Jusqu’à présent, très peu d’expositions sur les origines du japonisme ont été organisées en France et au Japon. C’est tout l’intérêt de l’exposition « L’aube du Japonisme ». Les pièces présentées ont été empruntées à des musées français, mais nombreuses sont celles exposées pour la première fois à Paris.

Tsutomu Sugiura, Président de la MCJP :

 » Tandis que nous attendons avec impatience le lancement de la série de manifestations commémorant le traité en 2018, je serais ravi si vous avez une pensée pour Japonismes 2018 lorsque vous visiterez l’exposition qui se penche sur les origines du japonisme jusqu’au 20 janvier 2018. »

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Tagawa Yoshitsuya (1822-1866), Yorimitsu rencontrant Kintoki au mont Ashigarayama, 1858 ©Bibliothèque municipale de Rouen

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Les premiers collectionneurs à l’origine du japonisme en Europe

Trois parcours, trois trajectoires

Le Hollandais Johan Willem de Sturler (1774-1855) arrive en 1823 au comptoir Deshima dans la rade de Nagazaki (où les étrangers étaient astucieusement isolés de la terre ferme). Il y sera le chef de la factorerie durant trois ans.

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Comptoir hollandais de Deshima à Nagasaki, anonyme (dessinateur), avant 1842, Japon © MUSÉE NATIONAL DE LA MARINE/P.DANTEC

Aux côtés, notamment, du médecin allemand Philipp Franz von Siebold, il se rend à Edo en 1826 pour la visite réglementaire au shogun qui a lieu tous les quatre ans. Il y acquiert une série d’une vingtaine de peintures de Hokusai et son atelier, qu’il emporte avec lui lorsqu’il quitte le Japon pour Batavia en août 1826. En 1855, son fils offre à la Bibliothèque impériale de Paris (actuelle BnF) la collection de peintures, d’estampes et de livres de son père, qui est classée au département des Manuscrits. A la différence du fonds Siebold, aucun inventaire de la collection Sturler n’a été retrouvé.

Paul Ginier fait plusieurs voyages « à la Chine et dans la mer des Indes » et constitue une importante collection d’objets de Chine et du Japon. Il présente son Musée chinois et japonais à Marseille en 1839 avant de le vendre à MM. Deschaux et Cie qui l’expose au Bazar Bonne-Nouvelle, à Paris, de 1840 à 1842. Avec environ 860 objets japonais, soit près d’un quart des pièces exposées, à côté d’objets de Chine et de diverses contrées de l’Asie du Sud-Est, cette exposition est un véritable évènement pour un premier aperçu de la civilisation japonaise. Le musée de la manufacture de Sèvres, intéressé par l’étude encyclopédique des techniques de la céramique, y achète des pièces variées. Le musée de la Marine au Louvre enrichit ses collections ethnographiques des pays lointains en y acquérant une centaine de pièces des différents pays d’Asie orientale.

Le baron Charles de Chassiron (1818-1871) est membre de la mission diplomatique française en Extrême-Orient, dirigée par le baron Gros, qui quitte la France en mai 1857 et séjourne en Chine avant d’aller au Japon.

Le journal qu’il tient durant son voyage, Notes sur le Japon, la Chine et l’Inde, 1858 –1859 –1860, est publié en 1861. C’est sans doute au bazar de Shimoda, bourgade au sud-ouest d’Edo où la mission française doit attendre quelques jours en septembre 1858, qu’il acquiert les laques de sa collection. À Edo, il se procure des livres – dont plusieurs de Hokusai, des ivoires, des céramiques, des objets en métal… Tous ces objets sont faits pour le marché japonais et diffèrent de ce que l’on pouvait jusqu’alors rapporter de Chine. Ce qu’il va rapporter de ce voyage est toujours conservé à La Rochelle…

Repères

Chronologie des contacts entre l’Occident et le Japon du XVIe siècle à la fin de l’époque d’Edo (1603-1868)

1543 Arrivée des Portugais à Tanegashima, une île au sud du Kyûshû. Début du « siècle chrétien ».

1586 Première ambassade japonaise en Europe, avec des présents pour le roi d’Espagne et le pape.

1597 Premières exécutions de chrétiens à Nagasaki. 1603 Tokugawa Ieyasu devient shogun. Début du bakufu (gouvernement militaire) d’Edo.

1609 Les Hollandais de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC), établissent un comptoir à Hirado, dans le Kyûshû.

1613-1623 The Honorable East India Company of London s’installe à Hirado.

1613-1620 Ambassade de Hasekura Tsunenaga (1571-1622) au Mexique, en Espagne et à Rome, envoyée par le daimyô (seigneur féodal) de Sendai, qui apporte des cadeaux au roi d’Espagne et au pape. Elle fait une brève escale à… Saint-Tropez, documentée dans l’exposition ! Les liens commerciaux prévus avec Séville n’aboutissent pas.

1613 Proscription du christianisme.

1615 Affermissement du régime des Tokugawa.

1635 Un décret interdit à tout Japonais de se rendre à l’étranger. Ceux résidant outremer ne peuvent rentrer au Japon.

1639 Les Espagnols et les Portugais sont expulsés et le catholicisme totalement interdit.

1641 Les Hollandais de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales sont forcés de quitter Hirado pour l’îlot de Deshima, dans la baie de Nagasaki.

1720 Fin de l’interdiction d’importer au Japon des livres étrangers.

1789 Révolution française : Le Japon en entend parler…

1793-1795 Interventions militaires françaises aux Provinces-Unies (Hollande).

1799 La Compagnie néerlandaise des Indes orientales est dissoute.

1797-1809 Des bateaux américains commercent, sous drapeau hollandais, à Deshima à la demande de la Hollande qui n’était plus en mesure d’envoyer sa propre flotte en raison de la situation en Europe.

1806 Napoléon transforme la République batave en royaume de Hollande (son frère Louis en devient le roi), puis en 1810 en départements français.

1815 Le congrès de Vienne institue un Royaume-Uni des Pays-Bas (anciennes Provinces-Unies et Pays-Bas autrichiens) avec deux capitales, Amsterdam et Bruxelles, jusqu’à la création du royaume de Belgique en 1830.

1823-1829 Séjour au Japon de l’Allemand Siebold en tant que médecin du comptoir hollandais de Deshima.

1840-1842 Exposition-vente du Musée chinois et japonais de Paul Ginier par MM. Deschaux et Cie, au Bazar Bonne-Nouvelle, à Paris.

1844 Mission Lagrené : signature du traité de Whampoa, près de Canton, entre la France et la Chine. 1845 L’amiral Cécille tente en vain de débarquer à Nagasaki.

1853-1854 Le commodore Perry force le Japon à ouvrir des ports (Nagasaki, Shimoda, Hakodate) pour l’approvisionnement des bateaux occidentaux.

1858 Traité d’amitié et de commerce entre le Japon et la France, après ceux signés avec les Etats-Unis, la Russie, la Hollande et l’Angleterre la même année.

1860 Sac du Palais d’été de Pékin par les Anglais et les Français. Certains militaires français voyagent l’année suivante au Japon.

1862 Ambassade japonaise en Europe. Nadar et Potteau en photographient les membres.

1864 Incidents graves au Japon entre partisans et opposants à l’ouverture à l’Ouest. Bombardement de Shimonoseki par les Occidentaux. Ambassade japonaise en Europe qui tente vainement d’obtenir la fermeture de ses ports. Nadar et Potteau en photographient les membres.

1867 Pour la première fois, le Japon participe officiellement à une Exposition universelle, à Paris. A cette occasion, visite du prince Tokugawa Akitake. Potteau photographie une geisha qui participe à l’exposition.

Tokugawa Yoshinobu abandonne ses fonctions de shogun fin 1867, en rendant formellement le pouvoir gouvernemental à l’Empereur.

1868 Restauration de Meiji. Début de l’ère Meiji.

4 réflexions sur “De l’aube des « Japonismes 2018 » au Tandem Paris-Tokyo : 160 ans de relations France-Japon

  1. A reblogué ceci sur Parallèles Potentielset a ajouté:

    Le « Tandem Paris- Tokyo » va nous en faire voir de belles (expos) toutes l’année. En plus de la série de manifestations commémorant le traité du commerce et de l’amitié franco-japonais de 1858 en 2018. Ce sera « Japonismes 2018 » sur toute la ligne !

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