1. Allez visiter l’hôtel de la Marine, il est juste sublime. C’est une claque esthétique sans fin de salle en salle. Un palais dans votre tête, le casque fourni vous remet dans le bain historique. Ils ont fait en version moderne une voûte céleste et un parvis à vague lumineuse. Ce sont les petits twists entre modernité et patrimoine.




Et puis vous avez la Loggia à colonnes donnant sur la Concorde. On peut s’y trémousser comme des princesses au crépuscule…




Le musée- collection Al Thani
2. Après, de l’autre côté du bâtiment, vous entrez dans le musée Al Thani. Un neveu de l’émir du Qatar. Il a acheté ici une concession longue. Avec le paquet de millions 💶 qu’il fallait. Il raffole des oeuvres miniatures antiques. Belles à pleurer. Et des arts islamiques, si raffinés.
Il est très bien conseillé. Sa collection est belle à pleurer. C’est Noël toute l’année. Dans les yeux, dès l’entrée…


L’histoire longue (pour ceux qui lisent)
En 2015, le ministère de la Marine quitte l’Hôtel de la Marine à Paris pour rejoindre le nouveau site du ministère de la Défense au sud de Paris. Le monument est alors confié au Centre des monuments nationaux. Objectif : restaurer le bâtiment et faire revivre aux visiteurs le temps du « Garde-Meuble de la Couronne », à l’époque de sa construction au XVIIIe siècle.

Après plus de 200 ans d’occupation de l’Hôtel de la Marine par le ministère et l’état-major de la Marine, l’organisation interne du bâtiment ainsi que les décors avaient beaucoup évolué.
Le Centre des monuments nationaux, à qui a été confiée la gestion du monument et son ouverture au public, a fait le choix, chaque fois que cela était possible, de restituer les décors d’origine : ceux du Garde-Meuble de la Couronne au XVIIIe siècle, témoignage exceptionnel de l’excellence de l’architecture et du décor à la française.
“Restitution”, car il s’agit bien ici de remettre les lieux dans leur état premier, celui de la construction des bâtiments au XVIIIe siècle. Le CMN et les équipes de conservateurs restaurateurs ont, en effet, eu l’heureuse surprise de découvrir les décors muraux, plafonds ou planchers d’origine sous les ajouts successifs des XIXe et XXe siècles !
Les visiteurs replongent ainsi dans l’atmosphère unique d’un appartement du siècle des Lumières. Les salons d’apparat qui bordent la loggia ont été maintenus dans le décor voulu par le Ministère de la Marine au milieu du XIXe siècle.
L’ouverture au public de l’Hôtel de la Marine a poussé le Centre des monuments nationaux et ses conservateurs à conjuguer restitution et restauration du bâtiment. Mais, au fait, quelle différence entre l’une et l’autre ?
● Restitution : c’est l’action de rétablir un objet dans son état originel en enlevant les traces des modifications et altérations ultérieures qu’il a pu subir.
● Restauration : il s’agit de remettre en état une œuvre ou un monument en essayant de respecter au maximum son état actuel et son style.
À l’Hôtel de la Marine, il a été décidé de restituer les appartements de l’intendant, dans l’état qui était le leur à la fin du XVIIIe siècle en effaçant les traces du passage du ministère de la Marine.
Cela fut rendu possible grâce à la découverte des peintures d’origine, sous les couches de peintures plus récentes, et à leur restauration ainsi qu’au recours à des matériaux et techniques de l’époque…
La première phase des travaux a consisté à rendre au bâtiment ses volumes d’origine.
En deux siècles, les besoins de la Marine en espaces ont évolué : plus de bureaux, installation d’ascenseurs mais également arrivée de technologies nouvelles comme l’électricité, le téléphone ou encore internet. Pour gagner de la place, certaines pièces ont été entresolées, c’est-à-dire qu’un plancher intermédiaire a été installé afin de doubler la surface au sol.
Au premier étage, l’ancienne galerie des bronzes, ouverte sur la cour intérieure, avait également été fermée et entresolée pour gagner de l’espace.
La première phase du chantier a donc permis de supprimer ces ajouts pour retrouver l’état d’origine du bâtiment tant dans son aspect extérieur qu’intérieur.
Les travaux de l’Hôtel de la Marine ne sont pas qu’un retour vers les origines du bâti.
Le maître d’ouvrage a souhaité une touche de modernité en coiffant d’une verrière la cour de l’intendant et en dotant la cour d’honneur d’un tapis de lumière qui est trop beau la nuit..un Motif d’onde ou de mer, assez proche dans l’idée du motif des vagues noires sur fond blanc des pavés au Portugal et au Brésil…

Ainsi le bâtiment offre-t-il l’exemple d’un dialogue fructueux entre le XVIIIe siècle et le XXIe siècle.

● 3 ans de chantier
● 1 200 m² de décors à dégager
● 130 M€ de budget
● + 40 entreprises engagées dans les travaux
● 500 menuiseries restaurées
● 330 m² de verrière créée pour couvrir la cour intérieure
● 12 700 m² de surface totale rénovée dont 6 200 m² pour les espaces ouverts à la visite
Sources : Hotel de la Marine
Le scénario digne d’un roman policier…
11-16 septembre 1792 : le casse du siècle
Le 17 juin 1791, l’Assemblée Constituante décide de faire procéder à l’inventaire complet du Garde-Meuble. En effet, la fuite de la famille royale fait craindre qu’elle n’ait emporté son trésor avec elle ou qu’elle ait missionné des proches pour le récupérer afin de payer les armées contre-révolutionnaires. Le rapport d’inventaire ne révèle aucune disparition des joyaux de la Couronne mais un manque d’or.
Thierry de Ville d’Avray est soupçonné et il lui est enjoint de se tenir « aux ordres des commissaires ». Désormais surveillé, il aménage un meuble pour y cacher neuf coffrets comprenant les trois quarts des joyaux.
Après la prise des Tuileries lors des massacres de septembre 1792, le Ministre de l’Intérieur Roland fait arrêter Thierry de Ville d’Avray et fait nommer à sa place Jean-Bernard Restout au titre de Directeur du Garde-Meuble.
Alexandre Lemoine-Crécy, beau-frère de Thierry de Ville d’Avray qui avait la charge de Garde Général de la Couronne, remet les coffrets des bijoux à Roland et Restout. Le procès-verbal de récolement mentionne qu’ils n’ont pas été ouverts et ont été déposés dans la salle des bijoux, mise immédiatement comme l’ensemble du Garde-Meuble sous scellés en présence de Roland et Restout.
Le trésor, amassé depuis le xvie siècle par les rois de France, est alors composé de plus de 10 000 pierres, dont des pièces uniques telles que le « Grand Saphir » de Louis XIV, le diamant le « Sancy », le « Régent », des perles, des rubis, des émeraudes, des topazes et autres saphirs. La valeur de l’ensemble est alors estimée à 23 millions de livres.
À la faveur de la nuit du 11 au 12 septembre 1792, une quarantaine de voleurs menés par un certain Paul Miette escaladent la façade du Garde-Meuble à l’aide de cordes en prenant appui sur les réverbères de la désormais Place de la Révolution.
Ils atteignent le balcon du premier étage et protégés de la vue d’éventuels passants ils brisent un carreau puis percent un trou (toujours visible aujourd’hui) dans le volet intérieur du salon où sont entreposés les précieux bijoux.
Pendant quatre jours et nuits ils ripaillent, organisent une bruyante fête arrosée, font monter des prostitués, sans qu’aucun garde n’entende rien. Le 16, à la faveur d’une relève, une patrouille découvre que les scellés ont été brisés.
Préjudice
Mis à part le constat d’un désordre général, rien ne semble avoir été volé hormis les bijoux de la Couronne dont la vitrine qui n’a même pas été fracturée n’abrite que les coffrets vides. Quelques diamants seront retrouvés au sol mais le préjudice atteint près de 30 millions de francs.
La plupart des pillards sont appréhendés dans la soirée et le lendemain. Mis au secret, huit d’entre eux sont reconnus coupables de « conspiration tendant à spolier la République » et immédiatement condamnés à mort par guillotine.
Ville d’Avray est quant à lui retrouvé assassiné à la prison de l’abbaye où il avait été enfermé.
A qui profite le crime ?
Les enquêteurs ont relevé de nombreuses incohérences sur les lieux :
Les serrures des armoires contenant les diamants n’ont pas été forcées
Quarante voleurs ont pu entrer, sortir, ripailler et déménager 10 000 bijoux et pierres précieuses 4 jours et nuits durant sans attirer l’attention
La garde était opportunément réduite de façon irrégulière à la suite de maladies plus tard révélées comme non avérées ou de permissions imposées
Les bijoux immédiatement retrouvés étaient les moins précieux, nécessitant une connaissance et une expertise préalable que n’avaient pas les voleurs arrêtés.
Alors, à qui profite le crime ? plusieurs hypothèses sont possibles :
Est-ce Thierry de Ville d’Avray qui dès la fuite du Roi à Varennes sous le prétexte d’opérations de retaille ou de réparation avait réussi à évacuer les pierres les plus importantes vers des diamantaires flamands pour financer une éventuelle armée contre-révolutionnaire ? Il aurait alors remis les coffrets vides à Lemoine-Crécy qui lui-même aurait remis des coffres tout aussi vides à Roland et Restout ? Le procès-verbal mentionne que les coffrets n’ont pas été ouverts et des échanges avec les banquiers hollandais Vandenyver accréditent partiellement cette hypothèse.
Lemoine-Crécy aurait-il vidé les coffrets avant de les remettre à Roland et Restout ? À son profit ou en vue de financer une contre-révolution ? Le procès-verbal mentionne que les coffrets n’ont pas été ouverts.
Sont-ce Roland et/ou Restout qui auraient vidé les coffrets à leur profit ou à celui des armées révolutionnaires avant de les mettre sous scellé ? Le procès-verbal mentionne que les coffrets n’ont pas été ouverts lors de la remise et Restout ayant pouvoir de poser les scellés auraient pu les briser, voler puis les reposer.
Est-ce tout simplement l’insécurité et le chaos global qui régnaient à Paris en septembre 1792 qui explique la négligence de surveillance ?
Une dernière hypothèse milite pour le fait que face à une défaite certaine à la bataille de Valmy le 20 septembre 1792 pour les Armées Révolutionnaires pauvres, affamées, mal équipées, inexpérimentées et en infériorité numérique face aux Prussiens et Autrichiens qui marchaient sur Paris, Danton aurait récupéré les bijoux et les auraient offert au Duc de Brunswick à la tête des troupes ennemies. Il apparait en effet que les Généraux des anciennes armées royales Lafayette, Rochambeau et Luckner sont remplacés au dernier moment par des généraux acquis à la Convention (Kellerman et Dumouriez), que la bataille s’est interrompue au bout de quelques heures après des charges prussiennes molles et une retraite inexpliquée et qualifiée de « miraculeuse » de Brunswick qui n’a pas attendu l’arrivée de ses renforts autrichiens pourtant à proximité.
Épilogue
La plupart des bijoux sont retrouvés deux ans plus tard et rejoignent les collections du Muséum d’Histoire Naturelle dès 1795. En dépôt au Louvre on peut aujourd’hui les admirer dans la galerie d’Apollon.
Le « Bleu de France » réapparaît en Angleterre en 1812, mais entièrement retaillé ce qui lui a fait perdre son éclat initial à tout jamais. Il est désormais connu sous le nom de « Diamant Hope » et exposé à la Smithsonian Institution à Washington DC.
Sources : Wikipédia
Histoire d’un lieu
L’histoire du monument commence sous le règne de Louis XV. En 1755, le roi adopte les plans pour l’aménagement de la place de la Concorde. À l’issue d’un concours, son architecte, Ange-Jacques Gabriel, synthétise les 150 projets reçus et propose la construction de deux palais sur le côté nord, séparés par la rue Royale. Lorsqu’est posée la première pierre en 1758, les deux palais n’ont pas encore d’affectation.
En 1765, Louis XV décide de loger, dans celui du nord-est, le garde-meuble de la couronne. Ancêtre de notre Mobilier national, cette institution était chargée de meubler les résidences royales, de veiller à l’entretien et à la restauration non seulement des meubles, mais aussi des objets décoratifs (vases, bronzes, tapisseries…), des armes et armures… En 1772, l’intendant du garde-meuble, Pierre-Élisabeth de Fontanieu, s’installe dans l’édifice, où il fait aménager ses appartements.
Lieu d’administration et de conservation, le palais devient aussi un espace d’exposition où est présentée une partie des collections. Cet embryon de musée est ouvert au public, tous les premiers mardis du mois, de Pâques à la Toussaint. On pouvait y admirer, à côté de grands meubles, de tapisseries et d’armes, les joyaux de la Couronne, dérobés en 1792. À partir de 1784, son successeur, Thierry de Ville d’Avray, poursuivant cette politique muséale, ajoute une galerie des bronzes. Il procède à d’importants remaniements dans les appartements et leurs décors. Pour son épouse, il fait aménager un petit appartement à l’entresol.
En 1789, le ministère de la Marine partage dans un premier temps les lieux avec le garde-meuble, dont la liquidation progressive libère bientôt toute la place pour les nouveaux occupants. C’est le début de nombreuses transformations : extensions, acquisitions et surélévations bouleversent la physionomie et l’emprise de ce complexe immobilier. Du côté de la place de la Concorde, demeurent les espaces d’apparat, mais la galerie des meubles est remplacée en 1843 par deux salons, dont le décor évoque les grandes heures de l’histoire maritime nationale. Pour le reste, les décors intérieurs disparaissent. C’est du moins ce que l’on croyait avant le début de la restauration actuelle…
En prévision du départ du ministère de la Défense en 2015, le gouvernement envisage d’abord de céder, puis de louer à long terme les 22 000 m² du bâtiment. Le tollé immédiat dépasse les attachements partisans. Suivant les recommandations d’un comité d’historiens, le gouvernement accepte finalement de conserver ce lieu emblématique dans le giron public et de l’affecter au Centre des Monuments nationaux (CMN). Mais il se montre peu enclin à investir. Des solutions de financement pour le moins innovantes sont alors trouvées, rendues possibles par la spécificité de l’hôtel de la Marine. En effet, une bonne partie de la surface, qui abritait les services de la Marine, ne présente pas de caractère patrimonial. Ces espaces seront donc destinés à la location de bureaux. Et le CMN, gestionnaire du site, obtient un prêt bancaire de 80 millions d’euros, gagés sur les futurs revenus locatifs. Le budget de 130 millions est complété par un apport de 20 millions d’argent public, 10 de publicité et le reste attendu du mécénat.
L’opération, on le voit, ne coûte pas cher à l’État… Le chantier, sous la direction de Christophe Bottineau, architecte en chef des Monuments historiques, porte sur la totalité de l’hôtel.
Dans une première phase, achevée à l’été 2018, a été menée la restauration des façades et de couvertures, incluant les 500 menuiseries extérieures. Dans la foulée, a été engagée celle des cours et des intérieurs, qui doit s’achever début 2020. La pose d’une verrière sur la cour Saint-Florentin apparaît comme le signe le plus visible (et spectaculaire) de la transformation du monument.
Mais le plus intéressant se situe à l’intérieur. Les grands salons du XIXe siècle, déjà restaurés il y a une dizaine d’années, restent bien sûr inchangés ; ils seront inclus dans le parcours de visite de base. Un second parcours mènera aux appartements des intendants du XVIIIe siècle, qui réservent les plus belles surprises. Le parti pris a été de retrouver l’aspect de ces espaces à l’aube de la Révolution.
Dans les appartements de Ville d’Avray, les sondages préalables ont révélé la présence des décors originaux sous les nombreux badigeons apposés au fil du temps. Aussi a-t-il été décidé de les dégager à l’issue d’un long et minutieux travail mené par les restaurateurs de l’atelier Ricou. Dans le cabinet doré, les décors et lambris ont été retrouvés quasiment intacts derrière des parois en Inox, posées lorsque ce lieu servait de… cuisine. À l’entresol, dans l’appartement de madame de Ville d’Avray, ce sont des bouquets de fleurs peints qui ont été exhumés.
Sources : connaissancesdesarts.com