Je me transpose ce matin de Heraklion à Santorini
Une femme parle trop au micro pour vendre des excursions en 19 langues
L’espèce humaine fixe obsessionnellement son image
se reproduisant sans fin
Vers sa fin sur le pont arrière
Où la fumée des moteurs
Noircit les montagnes blanches de la haie d’honneur du mont Ida, culminant à 2632 mètres
Quelque part là-dedans, en ces montagnes blanches

Dans la montagne d’Ida
Zeus enfant avait sa caverne
Il faillit bien périr avalé par un monstre
Au stratagème plus piteux encore
Que ceux de l’engeance
Que l’on sait : je veux dire les humains
Pourtant, il avait su conserver sa part d’enfance, 242 grammes.
Netto. Net. Poids net. Puisqu’il faut toujours faire le point pour deux points de compréhension en plus
D’ailleurs le Zeus, il dansait sur le pont comme un gamin de à l’arrivée à Santorini du bateau
Il faillit bien rater l’arrêt
D’ailleurs il le rata, car le capitaine l’empêcha de descendre au dernier moment. Il dût donc revenir aux heures plus tard, via Naxos… Bah dis-donc !
Peut-être que cette péripétie, cette micro-aventure accrochée en devanture n’était qu’une micro-fiction de plus
Une petite friction de Zeus- ou un proton de son nombril riedelien – avec la réalité en plus….





C’est ainsi que j’ai finalement entraperçu à l’insu de mon plein gré les îles de Naxos, Paros, Mykonos, de nouveau Naxos, Santorin, où je descendis pour la deuxième fois, enfin ! Après en avoir été empêché par le maître de bord la première fois…
Huit heures de croisière au lieu de deux, ce fut une drôle d’expérience, flottante comme un métro stoppant entre deux arrêts…
Illustration avec l’artiste Saul Steinberg
» Le monde irréel de l’artiste capte une nouvelle réalité. Il se mue en un reflet d’une civilisation dont les moyens de communication empêchent que s’installe le vide entre les hommes. L’esprit de son humour, c’est l’esprit de Kafka, de Lichtenberg et de Ionesco, l’esprit de lucidité qui rit de son malheur et le domine en le métamorphosant en gaieté intelligente, écrivait Claude Roy.
Dans Steinberg 1971, il est souligné que Steinberg remontait l’histoire de l’art. L’artiste en démonte les pièces et les rouages et ressuscite, en retrouvant le style de chacun, Van Gogh, les Fauves, les Cubistes, Mondrian, Picasso ou l’Expressionnisme abstrait. La démarche de Steinberg, en ce domaine, est à l’opposé de celle des peintres – Picasso par exemple devant les Ménines – qui s’emparent d’une œuvre célèbre pour l’interpréter selon leur vision, pour tenter l’épreuve et tenir le pari de la traduire dans leur propre langage.
Les visées de Steinberg sont autres : il s’efface, réinvente écriture et technique, veille à leur fonctionnement, à leur fidélité. Par nécessité et calcul, il doit respecter le modèle et le faire entrer vivant dans son jeu. Il s’écarte en cela de la pratique picturale pour s’inscrire dans la tradition des écrivains qui, de Flaubert à Proust, et surtout de Joyce à Ezra Pound, ont usé de l’emprunt ou fait du pastiche un genre supérieur. L’imitation n’est alors que le maillon d’une chaîne, la partie d’un tout, l’étape d’un voyage.
La nature de l’entreprise suppose que chaque maillon soit façonné selon ses propres lois. Il s’agit en somme de découvrir ou d’apporter une signification à un ensemble hétérogène. Steinberg se déplace dans ce no man’s land introuvable qui séparerait littérature et peinture. Là, se perdant pour se trouver, il pourrait tenir deux rôles à la fois, celui de l’auteur d’Ulysse, dominant l’écriture et l’égarement de chaque journée, celui de Bloom allant à la découverte de soi et du monde dans la métamorphose de chaque lieu de l’itinéraire. » *
* © Maeght 2021
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