La belle histoire du jour : topographie d’un lieu, une région, les régions que visita le naturaliste Alexander von Humboldt en Colombie… Au cœur d’un être éclairé. Kaspar David Friedrich peignit-il cela ? Disons oui !

Le parc national naturel de Sumapaz est un parc national situé dans la Cordillère Orientale et réparti sur les départements de Cundinamarca, Meta et Huila, en Colombie. Il est considéré comme le plus grand écosystème paramo du monde.
Il fut créé en 1977 en raison de son importance en tant que réserve de biodiversité et de ses ressources en eau douce pour la région la plus densément peuplée du pays, la savane de Bogota.
Histoire
Le páramo de Sumapaz était considéré comme un site sacré par les indiens Chibcha. Il était associé avec les forces divines de la création et de l’origine de l’humanité, en faisant un domaine où les hommes ne devaient pas entrer.
Durant le seizième siècle, l’aventurier et conquistador allemand Nikolaus Federmann conduisit une expédition à travers le Sumapaz à la recherche du trésor mythique d’Eldorado avec des pertes sévères.
L’endroit fut nommé par les espagnols « País de la Niebla » (« Pays du Brouillard ») à cause des nuages denses au niveau du sol diminuant sensiblement la visibilité[2].
En 1783, José Celestino Bruno Mutis y Bosio conduit une expédition dans le but d’étudier la faune et la flore de la région. Toutefois le paramo ne fut pas visité en raison des rudes conditions climatiques.
Le naturaliste allemand Alexander von Humboldt * fit la première description du paramo et des plantes locales en 1799[3]. Il nota également la présence de vallées glaciaires et associa les formations géologiques de la région avec celles de la géologie alpine.
Au début du vingtième siècle, le naturaliste espagnol José Cuatrecasas fit d’importantes recherches sur le paramo et la limite des arbres. Les autres scientifiques qui décrivirent et étudièrent le paramo de Sumapaz sont Ernesto Guhl (es), qui conduisit des recherches sur la flore durant trente ans, et Thomas van der Hammen[2].
* Cap sur Humboldt
Dans les notes de son journal de voyage en Colombie, [1] Humboldt va prendre le temps de coucher sur le papier le moindre détail observé, qu’il soit d’ordre géographique, géodésique, astronomique, climatique ou anthropologique. Les relations établies par Humboldt entre ces deux derniers aspects vont constituer la base de notre analyse.
Ses notes, beaucoup plus spontanées que le récit historique du volume III du Voyage aux régions équinoxiales [2], vont nous révéler un pays que nul autre voyageur n’avait exploré et étudié ainsi à l’époque.

Un seul, peut-être, Joaquin Francisco Fidalgo, alors commandant du port de Carthagène, [3] présente quelques traits de ressemblance avec la méthode humboldtienne dans la nouveauté des résultats astronomiques et géodésiques et plus particulièrement dans la comparaison des latitudes et des longitudes. Une autre similitude apparaît dans l’originalité de la peinture des groupes de populations, particulièrement développée dans le journal du voyage en Colombie et souvent méconnu du public car tardivement publié en espagnol [4], et à l’heure actuelle, il n’existe toujours pas de traduction en français.
L’étude de ce journal de voyage met donc en lumière une facette originale de Humboldt à différents niveaux.
D’une part, au-delà de la dimension purement scientifique, ce qui transparaît de ces écrits est la force brute du témoignage. En effet, ces extraits de journaux, de par le fait qu’ils ont été rédigés sur le vif, sans recul et en fonction d’un contexte précis — l’évolution de Humboldt à travers différents milieux sociaux et géographiques — présentent des traits caractéristiques. Ils sont originaux de par leur aspect spontané, mais aussi partial et subjectif. À travers eux, on découvre donc l’homme avec ses préjugés et sa sensibilité propres à son milieu et à son époque, mais également l’homme empli de lucidité et de clairvoyance voire d’une modernité étonnante dans la tenue de certains propos qui peuvent être qualifiés de visionnaires.
Devant ces écrits, nous sommes ainsi face à un témoignage, sous l’aspect d’un journal qui n’est pas tenu à la rigueur scientifique en ce qui concerne ses observations sur les groupes sociaux que nous avons choisi d’analyser. Il convient de le préciser car cela va nécessairement orienter la démarche à suivre et le recul à adopter face à l’analyse d’un tel texte en le replaçant en particulier dans la mentalité de l’époque.
D’autre part, Humboldt, en tant qu’homme, prussien, aristocrate et européen du xixe siècle, va se trouver confronté à cette multiculturalité qui caractérise l’Amérique latine dans toute sa diversité. Mais si l’on dépasse l’étalage de certains repères culturels voire préjugés et attitudes propres à une époque et à une classe sociale, Humboldt, avec sa sensibilité, mais également sa qualité de scientifique et sa réflexion logique, a su mettre en évidence dès les années 1800 les problèmes sociaux qui gangrènent encore aujourd’hui ce qu’il appelait les régions équinoxiales du nouveau continent. Il s’attaque effectivement, à travers ses témoignages, aux failles du système colonial et aux injustices que ce système a engendrées. Ainsi, même s’il est encore question de « race » chez Humboldt, ses observations ont le mérite de révéler les particularités des différentes populations, qui constituent en fait des groupes socio-ethniques. Se situant dans la lignée des grands chroniqueurs tel Bartholomé de las Casas, il dénonce donc, parfois avec véhémence, l’aspect erroné des rapports entre travailleurs exploités et exploitants créoles, ainsi que l’image négative des Noirs et des Indiens portée par les Créoles espagnols à travers l’Europe.
Ce sont ces aspects qui font toute l’originalité du scientifique éclectique car même Fidalgo s’est limité à la simple représentation des populations indiennes. Humboldt, lui, analyse les hommes, essaie de les comprendre et de les replacer dans leur contexte politico-social, qu’il s’agisse du simple rameur, d’un porteur ou bien d’un savant comme Mutis ou Caldas.

C’est d’ailleurs grâce à Mutis que Humboldt va choisir de remonter le Magdalena à l’intérieur des terres au lieu de naviguer depuis Panamá jusqu’à Guayaquil. En effet, il tient à connaître le savant colombien, et sa découverte du quinquina. Il décide donc de changer d’itinéraire. Cette modification de trajet est capitale, car elle permet à Humboldt de prendre conscience à l’époque de la différence entre les Colombiens de la côte et du Magdalena et ceux de l’intérieur. [5]
Son analyse propose des visions différentes selon les lieux géographiques où il se trouve. Il établit finalement un lien entre identification de la population et situation géographique. Cette distinction entre le monde du nord de la capitale et celui du sud du pays : entre la côte et son fleuve, et celui des Andes apparaît nettement. Humboldt le signale dans la première partie de ses notes de voyage en l’expliquant par l’influence du climat, théorie non novatrice mais qui fait sens en Colombie.
Pour lui, les personnes qui ont fui la côte, expulsées ou poursuivies par des ennemis, se sont réfugiées dans les zones froides et en sont redescendues pour conquérir des terres plus chaudes. Elles y ont imposé leur culture et leurs besoins et elles ont transmis à leurs habitants le goût et la nécessité du travail, qualités absentes chez les personnes qui habitent sur la côte puisque tout leur est offert naturellement. Et il est étonnant dans la justesse de ses remarques lorsqu’il conclut que plus on va vers le sud, plus l’art est développé, surtout à Quito, Pasto et Popayán, où les Espagnols ont paradoxalement perpétué la pratique indienne de la sculpture et de la peinture.
Puis progressivement, ses descriptions des groupes vont dépasser la simple application de la théorie des climats pour prendre en compte les caractéristiques socio-culturelles des groupes et des indigènes en particulier. C’est cela qui constitue l’intérêt et l’originalité de ses notes de voyage traduites en espagnol et publiées par l’Académie colombienne des Sciences Exactes, Physiques et Naturelles en 1982. Et c’est ce que nous ne retrouvons pas dans la Relation historique qui est une publication revue, polie, où Humboldt, après avoir travaillé sa langue et son récit, présente son travail en français de façon recentrée sur son travail de scientifique. [6]
Ses premiers textes, qui sont réellement des notes de voyage, des commentaires et des réflexions, complètent le Voyage aux régions équinoxiales en apportant une vision moins descriptive de l’œuvre du savant prussien. Ils offrent donc une nouvelle approche de ses écrits, beaucoup plus personnalisée. Humboldt n’hésite pas à prendre position, à dénoncer gouvernement, politique, esclavagisme.
À partir de ce voyage en Colombie effectué entre le 26 mars 1801 et le 24 décembre de la même année, nous allons insister sur la modernité de Humboldt dans sa manière d’appréhender le problème social des populations lorsqu’il analyse les hommes, quelle que soit leur origine, au sein de leur famille, dans leurs occupations, leur environnement naturel, et toujours en ayant soin de justifier leur situation ou leur position. C’est donc une vision holistique [7] qu’il nous offre ici avec toutes les caractéristiques de ce système de pensée original et non encore reconnu en ce début de xixe siècle… »
Deux Pistes potentielles : ici, si le cœur vous en dit… https://www.cairn.info/revue-etudes-germaniques-2011-1-page-73.htm
Et là… Le grand scientifique allemand Alexander von Humboldt, dont on commémora en 2019 les 250 ans de naissance, avait pour compagnon d’exploration le médecin, botaniste et naturaliste français, aussi modeste que méconnu, Aimé Bonpland… https://www.google.com/amp/s/www.la-croix.com/amp/1201068207
Adendum aux années Vingt
Lavez-vous fréquemment la conscience. Débordez-là dans la Seine. Avec l’envahissante fragilité des pigeons roucoulant sans fin sur les rebords de fenêtre. Lavez vos mails avant d’en supprimer des milliers par jour, levez vos mains, humains !