Toujours la lumière d’une encore chaude journée d’octobre
Passage du Monténégro
Où je fus à peine
Le nom de ce passage, déjà comme un voyage, me rappelait celui d’avant hier à Monte Estoril, près de Lisboa, où je dormis deux nuits rue du Lido, entre rue de Nice et de Saint-Gallien sur un petit mont dominant la mer.
Chez une Russe qui sortit le premier soir en combinaison de satin jaune lumière foncée.
Retour à Paris, du côté de Télégraphe. Un samedi matin, une trame de cinq âmes se tissant mot à mot.
Je les rejoignis au petit cimetière du Télégraphe, baignant dans la lumière irréelle de racines humaines automnales, comme soumises au pilori du temps.
On se souvînt ici que Léon Gaumont, inventeur du cinématographe en 1902, y demeure à jamais. Ce décor, filmique s’il fait beau, lui va très bien
Sa tombe est bellement historique… Son cinéma est notre cinéma. Celui du lent travelling de nos existences ?
Un plan très filmique. J’adore les châteaux d’eau jumeaux dominant ce cimetière.
Voguant sur l’absence de toute leur attention flottante
C’est bienveillant un cimetière, sans morbidité.
On a – on prend – le droit de toucher le marbre d’un doigt rêveur : elles ne s’en porteront pas moins bien si on les touche, ces pierres tombales, dans la lumière flottante du 6 octobre de l’an de grâce 2018+ 312
Premier regard
Émilie dit bonjour à son grand-père gisant ici, émotion tranquille.
Raymonde, qui est dans le coin depuis un bail, fait valoir que monseigneur Gaillet, chanoine de l’église de Belleville, créateur de la chorale des « Petits chanteurs de la Croix de bois’, qui eut son heure de gloire, y est aussi. Une aimable gardienne nous le trouve vite. Sa pla(n)que est bien aussi.
Quelqu’un dit l’émotion devant des tombes d’enfants dont les dates indiquent qu’ils ont vécu huit ans, à peine. La surprise qu’il y a à lire ces vies trop courtes entre deux dates
Elle dit, les tombes des enfants…
Je dis, les enfants des tombes.
Pensant à une foule de tombes
Qui seraient comme une cour de récréation. Ou de recréation. Qui sait ?
On pousse comme prévu par la ballade jusqu’au troisième lieu. C’est le Regard de la lanterne achevé en 1613. Il s’agit de la tête d’aqueduc des regards de la Mare, des Cascades, ci dessous.
Mais la tête d’aqueduc est à place des Fêtes, rue Compans. Ce regard de belles pierres, au toit tout rond, me rappelle un gros buron paysan sur le superbe Plateau de l’Aubrac, en Aveyron. Mieux vaut ne pas y tomber en panne en hiver… Il n’y aura personne !
Le Regard de la rue Compans mène en descendant par 28 marches vers la source de Belleville.
Raymonde se souvient que ces regards étaient jadis ouverts aux passants. Fermés depuis par souci municipal de sécurisation urbaine.
Rebond riedelien
Ce n’est pas sympa d’occulter des regards, de fermer le monde pour le sécuriser sans fin. Et ainsi le standardiser, l’aseptiser. Un mal nécessaire.
Comme les plaques d’égout menant au réseau souterrain et aux catacombes furent fermées vers 2001, après les explosions des tours jumelles new-yorkaises que l’on sait.
Toutes les plaques d’égout parisiennes furent condamnées. Sauf une ( au moins) dans le treizième parisien, fit remarquer la puissance invitante, bibliothécaire de son état. Elle a vu des gens y descendre illicitement. Comme moi, il y a 30 ans, vers les catacombes.
Elle dit aussi, Raymonde, l’histoire de sources qui furent délicates a maîtriser par EDF pour le nouveau réseau souterrain d’électrification. Lors de la mutation ( selon le cycle urbain destruction/ reconstruction ) de la Place des Fêtes. A la louche, c’était vers 1972…
A la louche des regards du temps
Cette promenade laisserait bien sûr un rien de magie de quartier dans nos yeux
Cette étincelle bienvenue créée par les âmes bibliothequaires de la rue Janssen. Un scientifique danois ou suédois, ce Janssen…
Les tours de la Place des Fêtes nous jouent des tours pendables.
Les degradeurs jouent leurs tours pendables : un jour, ils ont enflammé la boîte aux lettres de la bibliothèque.
C’est pour cela que la boîte aux lettres de la bibliothèque est condamnée, qu’on ne peut y laisser pour les restituer des livres après emprunt (de la vie). Des imbéciles les avaient enflammées, les boîtes… Alors elles sont condamnées
Alors qu’à la bibliothèque Fessart on peut toujours glisser son ouvrage emprunté pour un retour 24h/24
Dans la boîte aux lettres
en partance vers
L’éternel retour
Du cycle
Humain
Comme un Regard sans fin
Second regard, conclutif : celui qui revient sur l’évènement :
Ce fut une année à mirabelles comme les producteurs n’en avaient vu depuis 30 ans. Or, j’adore les mirabelles. Normalement il n’y en a plus fin août. Le 6 octobre, j’en pus encore acheter de belles et bonnes au marché Télégraphe.
C’est au plus haut point de Paris. Pour cela que Claude Chappe y avait installé son invention : le télégraphe. Qui était donc tout là-haut
À côté du cimetière flanqué des jumeaux châteaux d’eau. Où l’on venait de voir durant la balade poétique de la bibliothèque Janssen Fêtes, pour la seconde fois, la tombe de Léon Gaumont. Inventeur du cinématographe en 1902.
Un film de l’été en tête, une mirabelle en bouche à panacher avec fromage ou terrine de lapin aux noisettes, veuillez accepter la quintessence de ce petit idéal suranné pour dimanche de pluie de transition…
Bis, reprise, refrain
Il a été gentil, le tempo d’été 2018, magnanime en chaleurs tropicales ressenties de l’intérieur, enrichi en sensations cent pur sang douceur de vivre. Même la nuit Blanche 2018 ne fut point arrosée, c’est dire !
Ce fut une année à mirabelles comme les producteurs n’en avaient vu depuis 30 ans.
Le 6 octobre, j’en pus encore acheter de belles et bonnes au marché de la Place du Télégraphe. Au plus haut point de Paris, quelques 120 mètres.
Plus haut que les buttes Montmartre et Chaumont. C’est pour cela que Claude Chappe y avait installé son invention, le télégraphe.
Au plus haut de Paris
Comme plus tard, la tour Eiffel dût probablement sa survie a la création d’une antenne de liaisons radio militaires au sommet pendant la première guerre mondiale. Sinon, la dame scandaleuse était promise à la démolition. Jugée inesthétique. Comme le centre Pompidou le fut par la suite…
Mais redescendons de la tour Eiffel vers Télégraphe. Il y a là un lopin de cimetière flanqué de jumeaux châteaux d’eau.
Où l’on venait de voir, durant la balade poétique organisée par la bibliothèque Janssen Fêtes, pour la seconde fois, la tombe de Léon Gaumont.
Inventeur du cinématographe en 1902. Un film de l’été en tête, une mirabelle en bouche à panacher avec fromage ou terrine de lapin aux noisettes, veuillez accepter la quintessence de ce petit idéal musical suranné pour dimanche de pluie de transition.
Pour conclure (en l’absence de toute conclusion), veuillez agréer l’expression de nos meilleurs sentiments d’un hiver arrivant avec en antidote la renaissance annuelle à venir.
Avec cet humble poème calendaire en exprimant la quintessence.
Poésie calendaire riedelienne
Il faut bien que Novembre se spasme (sa brouillasse, son pic de suicidés métropolitains et déprimés se bourrant de médocs en chambre, les haloweeneries pour faire passer la pilule, le « Beaujolais navet » ensuite).
Se résigner à tirer Décembre, son lot de guirlandes marketing, familiales ou non, bulleuses en tout cas, sa trêve des confits saurs, la perspective de se faire enguirlander
Dérouler ensuite l’interminable et vilain Janvier jusqu’au 31
(encore un : celui de trop)
L’espoir renaît vaguement avec les jours s’allongeant depuis le 21
Se résigner à Février
( Si y a de la montagne, la pilule passe mieux)
Tasser Mars bien profond
dans la cheminée des maux nécessaires.
Jusqu’à son fichu 31
Avant qu’Avril, ses pluies incessantes, son unique semaine divine (voire deux, un an sur cinq?) n’annonce enfin, après tant de dérouillées humidasses…
Le muguet du Mai aimé !
Sa sensation fugace
d’être enfin re-né
En enfant de juin
Poussant tard le jour dans
la nuit enfin chaude de juillet
Cette micro éternité annuelle
S’étirant jusque fin octobre
Les bonnes années
Chaque année est une vie de plus
Un cycle de marchand magicien de quatre saisons
Chronos, sans fin
Ainsi revient
Et il…
…A toujours autant les crocs !
Tout là haut… Perché sur ses châteaux en Espagne intérieure
Les bonus (de savoir historique)
Le télégraphe a été inventé par Claude Chappe (1763 – 1805).
Les frères Chappe réalisèrent le 3 mars 1791 une première expérience publique de télégraphe aérien de Brûlon à Parcé sur une distance de 14 km.
Les télégraphes aériens furent adoptés le 26 juillet 1793 par la Convention nationale.
Le 16 juillet 1794 la première ligne officielle Paris-Lille fût mise en service.
En quelques années, 5000 km de réseau et près de 533 stations étaient mis en place, couvrant une partie importante du territoire français.
Le succès du télégraphe optique s’estompa et Bonaparte réduisit en 1800 les crédits alloués à leur construction et entretien.
Sad endingClaude Chappe ne supporta pas ce désaveu et désespéré se jeta dans un puits en 1805 à l’âge de 42 ans. Les frères poursuivirent le développement du télégraphe optique jusqu’en 1830, date à laquelle il fût définitivement arrêté.
Claude Chappe ne supporta pas ce désaveu et désespéré se jeta dans un puits en 1805 à l’âge de 42 ans. Les frères poursuivirent le développement du télégraphe optique jusqu’en 1830, date à laquelle il fût définitivement arrêté.
Le défaut du télégraphe de Chappe est qu’il ne fonctionnait pas la nuit et par temps de brouillard. Comme moi et mes frères humains, je le crains. Mais peut-être moins.
Ce défaut a eu une importance considérable dans l’histoire de France :
Lors du retour de Napoléon pendant les cent jours, celui-ci débarqua le 1 mars 1815 avec 1200 hommes au Golfe Juan, mais Paris, alors sous le règne de Louis XVIII, ne l’apprit par le télégraphe de Chappe que le 5 mars 1815, pour cause de brume.
De ce fait, Napoléon ne fût intercepté qu’au lac de LAFFREY juste avant Grenoble, le 7 mars 1815.
Le télégraphe de Chappe fût remplacé ensuite par le télégraphe électrique.
Principe de fonctionnement
Le télégraphe des frères Chappe est un dispositif mécanique de 5 m de haut constitué :
– de deux ailes ou indicateurs de 2 mètres de long et de 30 cm de large.
– de contrepoids pour assurer l’équilibre de l’ensemble.
– d’un manipulateur pour mettre en mouvement les ailes.
Explication de l’origine des
Regards du haut Belleville
Lors de promenades dans le quartier de Belleville , on remarque d’étranges petites constructions en pierre ayant la forme d’une maisonnette . Il s’agit des anciens regards permettant d’observer l’une des nombreuses sources qui jaillissait des hauteurs de Belleville...
Savies , ancien nom de Bellevilleétait une demeure rurale appartenant au domaine royal.
était une demeure rurale appartenant au domaine royal. Le plateau de Belleville-Ménilmontant, qui est la partie occidentale du grand plateau de Romainville-Les Lilas, oscillant entre 95m et 130m d’altitude, est coiffé d’une couche sableuse qui repose sur sous-couche quasi-horizontale de marnes vertes imperméables .
Cette dernière arrête et recueille toutes les eaux d’infiltration, qui réapparaissaient à l’origine (avant l’urbanisation) sous forme de multiples suintements tout au long du rebord du plateau.
A la recherche de ressources en eau à un débit suffisant et à pression constante, afin d’alimenter les thermes nouvellement construits à Lutèce, les Romains au IIe siècle reconnurent d’abord les différentes sources existant aux alentours : sur les collines d’Auteuil, de Montmartre, de Belleville-sur-Sablons.
Ces dernières, jugées les plus intéressantes, furent captées au moyen de nombreux drains en pierre enterrés convergeant vers un bassin. Ces ouvrages à l’efficacité certaine disparurent après les invasions successives des barbares. Ce tout premier aqueduc tomba ensuite dans l’oubli .
Ces terres furent distribuées au fil du temps aux différentes congrégations religieuses : les abbayes de Saint-Maur et de Saint-Magloire, d’abord , puis plus tard , à l’église Saint-Merri , au prieuré de Saint-Martin des champs, celui de Saint-Lazare, et à la Maison du Temple . Ces congrégations religieuses y trouvaient un avantage de choix : l’approvionnement en eau . En effet l’eau a toujours été rare à Paris, et la colline de Savies offrait l’avantage de contenir plusieurs sources captables. Afin de subvenir aux besoins de personnes dont elles avaient la charge. Les bourgeois de Paris y construisent leurs maisons de campagne dans les localités connues sous les noms de « la Courtille », le « Fief des Bruyères », et « Mesnil Mautemps ».
Pendant ce temps, les carrières des Buttes-Chaumont entraînent un accroissement de la population ouvrière. Au XIIe siècle apparaît le village de Poitronville caractérisé par ses prairies, ses vignes et ses sources qui alimentent les fontaines de Paris.
Poitronville est largement détruite par la Guerre de Cent ans et connaît une période de décroissance suite aux épidémies et une main-d’œuvre réduite.
Afin d’inciter les cultivateurs à rester, des terres seront distribuées, la dîme réduite et les taxes foncières exemptées .
Les bourgeois de Paris y construisent leurs maisons de campagne dans les localités connues sous les noms de « la Courtille », le « Fief des Bruyères », et « Mesnil Mautemps ».
Pendant ce temps, les carrières des Buttes-Chaumont entraînent un accroissement de la population ouvrière. Au XIIe siècle apparaît le village de Poitronville caractérisé par ses prairies, ses vignes et ses sources qui alimentent les fontaines de Paris.
Poitronville est largement détruite par la Guerre de Cent ans et connaît une période de décroissance suite aux épidémies et une main-d’œuvre réduite.
Afin d’inciter les cultivateurs à rester, des terres seront distribuées, la dîme réduite et les taxes foncières exemptées . Le nom de Belleville apparaît au XVème siècle et le village connaît une période de prospérité jusqu’à la Guerre de Religion. La position stratégique du village le rendant particulièrement vulnérable, il a été largement détruit.
Belleville – 1805 Belleville – 1829 Barrière de Belleville
Les Rues des Rigoles , de la Mare , de la Duée , des Cascadesrappellent combien Belleville et ses alentours étaient riches de sources jaillissant un peu partout .
rappellent combien Belleville et ses alentours étaient riches de sources jaillissant un peu partout . Il fallut attendre l’an mil pour que les moines du prieuré de Saint-Martin-des-Champs, en construction, éloigné de la Seine et ne pouvant se satisfaire de quelques puits pour le service d’une centaine d’âmes, s’intéressent à la colline toute proche.
En prospectant les lieux, ils redécouvrirent les anciens drains enterrés mais ceux-ci étaient endommagés ou colmatés. Ils entreprirent la restauration et ce nouvel aqueduc aboutit à Ménilmontant à un bassin de réception protégé par un édicule couvert : il s’agit du regard Saint-Martin qui, restauré à plusieurs reprises est parvenu jusqu’à nous.
L’aqueduc dit » de Savies » perdura, restauré jusqu’au XVIIIe siècle. Une nouvelle prospection des eaux du plateau, au XIIe siècle, fut le fait des moines soldats appelés chevaliers de Saint-Lazare qui, rentrant de Terre Saint, rachetèrent l’ancienne Abbaye St-Laurent pour en faire une maladrerie ( pour les malades de la peste).
Ils réalisèrent deux nouveaux aqueducs dont celui du Pré-St-Gervais. Toujours au XIIe siècle, le roi Philippe Auguste donna aux Parisiens une halle centrale pour remplacer la foire Saint-Laurent (située hors les murs) ainsi qu’une fontaine qu’il fit alimenter par l’aqueduc St-Lazare, mais cette ressource se révéla rapidement insuffisante.
Le roi décida alors d’un nouveau prélèvement direct sur la colline de Belleville, et à l’endroit le plus élevé. Il en résulta un nouvel aqueduc voûté partant de la source principale, où fut bâti le premier regard , le regard de La Lanterne (altitude 114m). L’édifice actuel (rue Compans) réalisé entre 1563 et 1613, est le plus monumental des regards existants aujourd’hui. L’aqueduc, qui plus bas prenait en écharpe le flanc du plateau jusque vers Ménilmontant, récupérait au passage de nombreux autres drains, collectés dans des bassins couverts, tels le regard des Messierset le regard de la Roquette tous deux situés rue des Cascades.
Cet aqueduc de Philippe Auguste est resté connu sous le nom d’aqueduc de Belleville, par opposition à ceux de Saint-Lazare et du Pré Saint Gervais . Les eaux de Belleville, ainsi acheminées par les trois aqueducs aux communautés religieuses et aux fontaines publiques, alimentèrent les Parisiens de la rive droite durant cinq siècles. De tout cela, il ne nous reste plus guère aujourd’hui que les quelques regards, plutôt émouvants au regard de tout ce qu’ils évoquent, de Ménilmontant, Belleville et du Pré St Gervais.
Vous êtes encore là, chers lecteurs ?
Bonne fin d’année !