Baccarat éclaire pupilles et papilles en son restaurant, le Cristal Room. A deux pas de l’Avenue d’Iéna et du musée des Arts Asiatiques Guimet (qui expose jusqu’au 22 février « Tigres de papier, cinq siècles de peinture en Corée »). Un square, feuilles automnales tombant des arbres baignés de lumière…Nous sommes au Musée Baccarat, Place des Etats-Unis.
Après l’ambassade du Koweït, entrons au 8, c’est l’Hôtel particulier de la Maison Baccarat (qui reçut l’an dernier pour ses 250 ans). Cet empire du lustre a été repensé par Philippe Starck, il a ajouté sa patte chic et sobre en soufflé néo-classique. Dans le hall, décor rêvé, lustres, œuvres d’art, fastes. Puis montée des marches, escalier hollywoodien, sobres feux de la rampe.
Une fois en haut, deux hôtesses distinguées. L’une mène, vers la gauche, au Musée Baccarat. Sa Collection de pièces d’art de la table crées pour les expositions universelles, un tsar de Russie, belle épure. On visitera après le café. Ou avant ?
L’hôtesse de droite mène vers le Cristal Room, ancienne salle à manger de la vicomtesse Marie-Laure de Noailles (1902-1971). Eprise d’art, mécène, elle soutînt et reçut Man Ray, Luis Buñuel, dans la Salle de bal juste à côté (qu’on peut louer).
Le Chef Guy Martin est aux commandes du restaurant depuis 6 ans avec une carte courte (4 entrées, plats et desserts) variant chaque mois. Baptiste Trudel, 32 ans, jeune chef au parcours d’initié, sublime les assiettes.
Le Sommelier vient du Grand Véfour, le Directeur, de l’Atelier Guy Martin, ils tentent leur bonne étoile, la cuisine est encore un peu pâte à oeil, pardon, tape à l’oeil, mais ce n’est pas mal. Le cadre est si beau… et un peu kitsch, comme Dali, oui ! Accordé ! Mais je plaide pour le droit à une once de kitsch raffiné…
D’abord, on ingéra un très charnu tartare de veau (les dés de viande sont coupés un peu gros) et gambas, jus au yuzu et pousse de shiso. Puis une lotte se piquant de gingembre, entourée d’émulsions joufflues au jus de coquillages.
L’eau pétille dans des verres violets Harcourt crées en 1841, qu’on entrechoque en… faisant rimer son cristallin et temps passé.
Avec leurs jeux de miroirs aux tons rouges en dédale infini, il faut passer aux toilettes : un rêve à la déco conçur en clin d’œil à une passion.Celle qui unit la vicomtesse à Jean Cocteau, qui lui écrivit :
« J’aime en toi la noblesse et le feu. ».
D’où les tons rouges : Ces lieux d’aisance en rendent scrupuleusement compte, non ?
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Pour ma part de rêve, j’eus longtemps dans un chez moi, posé sur une lampe de chevet cubique, transparente, en forme de glaçon, un cœur violet translucide, ramené de l’usine lorraine de Baccarat vers 2003.
Quand j’allume, mon cœur irradie la nuit, il y luit, on aime bien cette vision suavement violacée, plutôt distinguée, arrachée au néant et exfiltrée de l’usine Baccarat : c’était une chute, ce coeur avait des défauts, des rayures, fut donc éliminé, jeté vers le bac à chutes. Où je le pris, peut-être en catimini…
Voleur de coeurs… Je crains fort d’être doté moi aussi d’un coeur rayuré. Pas du tout garanti zéro défaut, j’eusse pu être récusé par le process industriel qui me vit naître -et manufactura – sur Terre. Absence de Dieu merci, ce ne fut pas le cas. D’où le privilège d’être ici avec vous, de vous raconter celà…
Voici mon article hybridant pour le meilleurs deux cristalliers et un lieu parisien, le Musée Dali :
Tél. 33 11 40 22 11 10 – resa@cristalroom.fr
Ps : N’oubliez pas de lever les yeux à Paris car…