Profiler : du cas Richard III au Théâtre du Soleil

Kappor VersaillesJ’aime ces effets du temps.

L’analyse ADN de son squelette, découvert sous une église devenue parking en 2012, a contribué à redorer l’image du roi maudit. Tué lors de la bataille de Bosworth en 1485, Richard III (que Shakespeare décrivait comme un monstre difforme) fut enterré 3 jours après, sans pieds, à Leicester. 

Les pelleteuses qui plantent leurs crocs dans le bitume du parking de Leicester, au centre du Royaume-Uni, en août 2012, ne mordent pas pour créer des places supplémentaires aux voitures des employés des services sociaux voisins. Plutôt pour offrir un repos éternel digne de ce nom à un squelette plié en deux sous terre, à l’étroit, depuis 525 ans. Un compte rond. Bravo pour en faire autant/ Qui nous déterrera sous une aire d’autoroute magnétique en 2540 ou 2640 (je vous accorde aisément 100 ans), je vous le demande ?
L’éminente Richard III Society, qui milite pour la réhabilitation du roi d’Angleterre que Shakespeare immortalisa comme un monstre difforme, « orgueilleux, subtil, faux et sanguinaire », a de bonnes raisons de croire que le dernier roi Plantagenêt gît à cet emplacement. C’est en effet là que se tenait l’église du couvent franciscain de Leicester, où le corps du souverain fut vraisemblablement enterré sans cérémonial, trois jours après sa mort à la bataille de Bosworth, le 22 août 1485.

Légère scoliose

Cinq siècles plus tard, le crapaud devient quasi colombe… 

Une équipe d’archéologues de l’université de Leicester a accepté de se lancer à sa recherche. Dès le premier jour de fouilles, une dépouille, sans pieds, mais en excellent état, est retrouvée à l’endroit visé. La méfiance reste de mise, après la révélation en 2010 de la vraie fausse découverte en France du crâne momifié du roi Henri IV : vérification faite par des tests ADN, la tête au lobe d’oreille percé acquise par un brocanteur dans les années 1920 n’a visiblement jamais appartenu au Français.

Le squelette de Richard III s’offre un sacré lifting
Aussi prudents que méticuleux, les scientifiques anglais accumulent cependant les preuves que le corps est bien celui de Richard III. La scoliose, d’abord. Le squelette présente une colonne vertébrale en « s », même si la difformité n’est pas telle que la décrivirent les témoignages de l’époque, la plupart rédigés par ses détracteurs pour salir son image, selon la Richard III Society.

Une reconstitution au laser du corps, après la découverte, révélera que la scoliose était à peine visible, loin de faire du souverain le bossu boiteux shakespearien, tout juste de quoi hausser une épaule.

Portrait de Richard III, son crâne découvert en 2012 et une reconstitution de son visageDe gauche à droite : Portrait de Richard III, son crâne découvert en 2012 et une reconstitution de son visage. Qui nous retrouvera 527 ans après notre trépas ? Zobi, zoba ! Photo: University of Leicester et APIC

Michael Ibsen : le cousin au quatorzième degré, menuisier au Canada 

Les blessures à la tête, ensuite. Le crâne a été abîmé à coups d’armes tranchantes — l’un porté au-dessus de la nuque, l’autre de chaque côté des tempes — qui lui ont ­visiblement traversé le cerveau. On dit que son cheval s’était embourbé en lisière d’un marais et que Richard III périt dans l’attaque des hallebardiers gallois qui l’encerclaient. La face souffre de multiples atteintes de dague, et le bassin est perforé, ce qui confirmerait les mauvais traitements infligés au cadavre du roi, affalé sur le dos d’un cheval après avoir été dépouillé de son armure, puis livré nu à la cruauté de la foule trois jours durant après sa mort.

Enfin, la comparaison de l’ADN du squelette avec celui de Michael Ibsen, actuellement menuisier au Canada et cousin au quatorzième degré de Richard III, par sa branche maternelle, a levé les derniers doutes : leur chromosome Y est bien identique… Entre gens de même famille, on se rend service : Michael Ibsen confectionnera de ses mains un cercueil en bois pour son ancêtre, cinq cent trente ans après sa mort, dix-sept générations plus tard…

 Vin, cygne et héron

Les récentes analyses chimiques des ossements ont permis de mieux connaître les habitudes alimentaires de celui qui gouverna l’Angleterre pendant deux ans. A la fin de sa vie, Sa Majesté buvait une bouteille de vin par jour et mangeait du cygne et du héron, volatiles qui ont laissé des empreintes dans ses côtes.

L’étude de ses fémurs, os plus denses, à la croissance très lente et à la mémoire plus ancienne, a montré qu’il avait connu une période de vaches maigres avant d’accéder au trône : la viande et le poisson étaient alors plus rares, et les céréales composaient l’essentiel de sa nourriture.

Bel homme élancé

Une nouvelle image de Richard III a détrôné l’ancienne : en sortant de terre, le crapaud est devenu colombe, des reconstitutions en images de synthèse ont fait circuler le portrait d’un bel homme élancé, altier, charismatique. Oublié les deux neveux de 9 et 12 ans dont il eut la tutelle après la mort de leur père, le roi Edouard IV, et qu’il aurait fait assassiner pour accéder au pouvoir !

On préfère désormais retenir ses actions novatrices, comme l’introduction de la libération sous caution ou la création d’une cour spéciale permettant aux plus pauvres d’aller en justice.

Il a même eu droit, en mars 2015, à une cérémonie de funérailles nationales dans la cathédrale de Leicester, au cours de laquelle l’acteur Benedict Cumberbatch, qui lui serait aussi apparenté, a lu un poème contemporain de Carol Ann Duffy où le souverain nous parle d’outre-tombe :

« J’ai rêvé un jour, de votre futur souffle, en prière pour moi, longtemps perdu, à jamais retrouvé… » O, c’est Bo… Et puiçs quoi enbcore, expèce de nombril-roi ?

Quel enfoiré, ce Richard-là, d’être ainsi miraculé avec sa tête de déterré… Squelette Richard Télérama 260715

Squelette Richard III, Bravo pour en faire autant.

Source, légèrement réécrite : Article de Marine Landrot publié le 26/07/2015 in Télérama.

Qu’on adore détester, surtout avec en couverture, illustrant la sempiternelle Rentrée littéraire, dont tout le monde se fiche (à part 888 vieilles à lunettes et 88 barbus à lunettes) :

Christine Ici Paris Prix de Flore Angot

Alias Je porte les chevaux ras mâchoire dure yeux noirs en couverture de Téléramuche, donc je suis une rebelle, période post doc Gynéco. Elle, il faudrait songer à la siphonner en tête. Dans un film de zombies de la Grande galerie urbaine, nombril d’abord, pose et imposture ensuite. Kappor Versailles

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Memorit

Cela me rappelle Georges Bigot, acteur, metteur en scène pour le Théâtre du Soleil de la Cartoucherie de Vincennes, cette fabuleuse équipée de 50 ans.

Je l’ai revu sur un quai de gare tandis que je partais en TGV au ski alpin il y a 34 ans. il accompagnait une amie caméraman, Catherine Logettes, dont l’ami d’alors était le comédien  Rufus. Elle fut mon amie pour un soir : Elle m’avait dit en me quittant : sois beau et tais toi.

Georges Bigot, acteur, metteur en scène, joua si bien le rôle de Richard II dans l’un des Shakespeare montés par la grande  prêtresse adorée Ariane Mnouchkine.

Un Richard II  que je vis en son antre théâtrale, avec mon inventive maman.

Retour sur cette antre et cette belle aventure du Théâtre du Soleil ici :

Pour fêter ses 50 ans d’existence, la troupe légendaire du théâtre du Soleil monte « Macbeth » avec 45 comédiens. Rencontre avec « la patronne », dans son antre…

1 journée au Soleil avec Ariane M 

« Qui aujourd’hui est à la cuisine, qui à la plonge?», demande Ariane Mnouchkine . Il est 9 heures du matin à la Cartoucherie de Vincennes, route du Champ-de-Manoeuvre, dans le 12e arrondissement de Paris. Mais on se sent à mille lieues de tout, dans un village, un phalanstère, sur un navire se préparant à appareiller.

On est au Théâtre du Soleil, bien sûr. Cette troupe universellement légendaire fête ses 50 ans en retrouvant Shakespeare, ce «père nourricier» comme dit Ariane Mnouchkine. Son «Songe d’une nuit d’été» enchanta l’année 1968. En 1982, un «Richard II» inspiré du nô et du kathakali resplendit dans la Cour d’Honneur d’Avignon. Cette fois, ce sera «Macbeth».

Sur le terrain, la légende a les mains dans le cambouis du théâtre. Ce matin d’avril, Ariane Mnouchkine organise, comme d’habitude, la journée de travail du Soleil. Chevelure grise en bataille, large pantalon blanc, elle écoute l’humeur des uns et des autres. Comédiens, techniciens, administratifs, une centaine de personnes font cercle autour d’elle. De grandes tables accueilleront plus tard chacun à l’heure du déjeuner. D’ici là, au boulot !

La troupe, école permanente

« A nos débuts, s’amuse Mnouchkine, on était un peu des boy-scouts, on a été moqués, j’aurais pu lâcher.» Et pourtant quand le Soleil naît, en 1964, il porte ce besoin de remise en cause des rigidités acquises, cette soif de liberté et d’imagination qui explosera quatre ans plus tard.

En 1967, c’est «la Cuisine» d’Arnold Wesker, puis «les Clowns», en 1969. Après le cirque, la foire, la fête foraine, voici «1789», la Révolution française vue par le petit peuple. On est en 1970, un mouvement fougueux emporte les scènes qui se jouent en simultané. «1789» fait salle comble jusqu’à Londres et Belgrade. Il annonce la forme chorale et étincelante des spectacles futurs dont les images raffinées, simples, séduiront plus tard l’Amérique, et jusqu’à l’Asie.

C’est alors que le Soleil s’installe à la Cartoucherie de Vincennes, laissée à l’abandon. Les comédiens gâchent le plâtre, repeignent. Dès l’origine, le Soleil existe parce qu’existent sa troupe, sa règle de partage des tâches et d’un salaire égal pour tous. Du moins quand on a pu se payer (1.800 euros net par mois actuellement). Comme le constate Mnouchkine:

Ça ne veut pas dire que c’est toujours facile. Le Soleil, c’est soixante-quinze personnes, et même plus en ce moment : c’est parce qu’on travaille beaucoup, tous. La troupe, c’est aussi une façon d’apprendre à vivre ensemble. On ne peut pas, le soir au café, tenir de grands discours écologiques et ne pas faire, dans la journée, l’effort de trier les poubelles. On ne peut pas prétendre que les politiques sont des minables – ce qu’ils sont très souvent – et dire que nous n’avons aucune responsabilité. Non. La troupe est une sorte de maquette du monde. Donc, qu’est-ce que nous, gens de théâtre, voulons comme monde?

Un monde solidaire, naturellement, où chacun ait accès au plaisir du théâtre et de la pensée, à une autre façon de voir la vie, sa vie.

Au Soleil comme chez Shakespeare, le monde est une scène, qu’on le regarde du côté des dieux grecs («les Atrides») ou des victimes du sang contaminé («la Ville parjure ou le Réveil des Erinyes»). Et tout peut faire théâtre : la partition de l’Inde et du Pakistan («l’Indiade ou l’Inde de leurs rêves»), le sort des Tibétains («Et soudain des nuits d’éveil»), l’odyssée des sans-papiers («le Dernier Caravansérail»).

On n’est pas ici dans l’inspection de son nombril. Evidemment, certains reprochent au Soleil ses fables parfois simplistes, car il y a les grands crus et les autres. Mais le souffle et la générosité sont toujours là. Mnouchkine se souvient:

Enfant, je rêvais devant «le Carrosse d’or» «le Capitaine Fracasse»… J’avais la sensation, qui n’a pas changé d’un iota, que la troupe était la seule façon de faire du théâtre, et de vivre le plus proche possible du bonheur, en tout cas, le plus souvent heureux. Et je pressentais que la troupe me permettrait d’apprendre sans cesse. 

Bien sûr il y eut des larmes, des colères. Certains sont partis – Philippe Caubère, Simon Abkarian – parfois revenus – l’Indienne Nirupama Nityanandan, qui joue aujourd’hui Lady Macbeth. D’autres sont morts, comme cette année le scénographe Guy-Claude François. La troupe continue, se renouvelle. Les comédiens, d’âges et de nationalités différentes, sont parfois issus des stages gratuits que le Soleil organise tous les deux ou trois ans. Deux mille postulants, trois cents retenus. Un énorme travail.«Mais heureux, fertile, dit Mnouchkine. On apprend ici que c’est en travaillant ensemble, en écoutant les autres, que le théâtre naît. On ne peut pas briller tout seul.» Le Soleil est une école permanente.

Le théâtre dont on rêve

Tout juste revenue du voyage au long cours des «Naufragés du Fol Espoir» un spectacle, puis un film – la troupe a mis en chantier «Macbeth» il y a six mois. Avec quarante-cinq comédiens, dont pas mal de novices. «Ils ont de la sensibilité, et cette crédulité nécessaire à l’acteur: il faut croire qu’un texte, ce n’est pas des mots, mais de la vie. L’imagination, ce patrimoine d’enfance, se cultive. Elle est aussi la condition de la compassion humaine.»

On sait l’engagement politique, humanitaire d’Ariane Mnouchkine. Les artistes en difficulté dans le monde entier ont les yeux tournés vers la Cartoucherie:

Il y a un équilibre à trouver entre l’accueil du monde, absolument nécessaire, et notre mission, qui est d’abord de porter le théâtre, en faisant venir les jeunes générations. Mais le Soleil doit rester ouvert, comme une maison.

Où voir ailleurs qu’au Soleil un Gitan pauvre et une Tibétaine en attente de papiers échanger des sourires avec une Hélène Cixous, appelée à la rescousse ce jour-là? L’écrivain prépare pour l’automne une nouvelle pièce, où, dans la foulée de «Macbeth», il sera question «du mal en politique, de la maladie qui afflige notre monde aujourd’hui, de la façon dont le crime se promène parmi nous». Hélène Cixous est tombée dans la marmite du Soleil en découvrant «1789»:

A l’époque, j’étais à Paris-VIII, alors dans le bois de Vincennes. Et j’étais avec Michel Foucault au groupe d’information sur les prisons. Je lui ai dit : «Cette jeune femme qui fait ce théâtre-là devrait être avec nous.» Nous sommes allés voir Mnouchkine, elle nous a rejoints. «1789» contenait tout en germe, notamment une manière d’associer l’exigence de l’art avec l’engagement moral et politique.

Plus tard, en 1985, Mnouchkine demandera à Cixous d’écrire pour le Soleil. Ce sera «l’Histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk, roi du Cambodge», une pièce de haut souffle sur le naufrage d’un pays dans le génocide khmer. Georges Bigot, le Sihanouk d’alors, l’a recréée cette année avec de jeunes acteurs cambodgiens. Le Soleil tisse sans cesse des fils, fait des petits. Comme le Théâtre Aftaab, une troupe de comédiens afghans issus d’un stage du Soleil à Kaboul, et qui vient de jouer au Piccolo Teatro de Milan. Mnouchkine a aussi fondé le Festival Premiers Pas pour les jeunes compagnies:

Nous, on est nés au bon moment, on se sentait portés, désirés. Aujourd’hui, c’est plus difficile. Il faut faire confiance à ces jeunes, leur donner des clés, même sans un sou. C’est ainsi qu’on est entrés à la Cartoucherie. On nous y a laissés.

L’avenir du Soleil après elle ? Mnouchkine y pense aussi. «Ici, sourit Cixous, on renonce à la gloire narcissique, on ne fait pas fortune. Mais on fait le théâtre dont on rêve, et c’est un luxe.» 

Les comédiens ne disent pas autre chose, qui improvisent des jours et des jours, répètent tous les rôles, et acceptent bien plus tard que la «patronne» leur dise s’ils joueront un roi ou un valet ; quand ils ne taillent pas les feuilles d’un arbuste en prévision d’une scène, ce que fait ce jour-là Maurice Durozier, roi Duncan sur scène, et jardinier en coulisses. «Il faut des acteurs très confiants et très courageux, reconnaît Mnouchkine. Je ne veux pas décider du sort de quelqu’un sans qu’il ait eu sa chance. D’ailleurs je me tromperais.»

Le village de la Cartoucherie

A ses comédiens, elle offre une malle aux merveilles : des centaines de costumes dormant sur des cintres, un bouquet de livres, qui parlent aussi bien de sorcières que de jardins anglais. Ils ont aussi à leurs côtés le musicien Jean-Jacques Lemêtre, homme-orchestre complice de tous les spectacles du Soleil.

Oui, la Cartoucherie ressemble à un village au fronton duquel sont inscrits ces mots : «Liberté, Egalité, Fraternité». On n’y vient pas uniquement pour voir un spectacle, mais pour partager une aventure. On est accueilli par Ariane Mnouchkine, par la chaleur de la cantine et des sourires, par une riche librairie dont l’offre est liée au spectacle. On pénètre dans la nef d’une cathédrale laïque, où les murs peints sont une incitation au voyage. Cette fois, un grand portrait de Shakespeare veille déjà.

Les réservations se font par téléphone : le contact humain, toujours. Le public est un corps «consanguin» du Soleil, le partenaire indispensable de la joie de ce théâtre, et de sa survie financière. «Là, nous sommes exsangues, avoue Mnouchkine. Alors je prie pour que les dieux du théâtre soient avec nous.»

Etonnante Mnouchkine, qui affirme se lancer dans chaque nouveau spectacle sans «acquis conscients», et confesse qu’à ses débuts, ignorante, elle pensait tout réinventer. «Enfin, on récolte inconsciemment. Peu à peu je me suis dit, tiens, Copeau, Meyerhold, Vilar, Brecht ont ressenti cela. Ils nous ont ouvert la voie.» La sienne est celle d’un théâtre magnifié, qui se joue de toute la gamme de l’art de la représentation, du bunraku («Tambours sur la digue») au cinéma muet («les Naufragés du Fol Espoir»):

La forme vient peu à peu, je cherche l’évidence. Vous vous rappelez cette phrase d’un petit garçon à Brancusi : «Comment savais-tu qu’il y avait un cheval dans cette pierre?»

« Je suis encore dans la marmite »

Mnouchkine a situé «Macbeth» dans «un contemporain atemporel»:

C’est une pièce tocsin qui nous alarme sur notre moitié obscure.«Un homme, ça s’empêche», dit Camus. Macbeth et Lady Macbeth lâchent leurs démons en croyant pouvoir les arrêter. Eh bien non. Le mal peut être séducteur et se parer de vérités exactes pour nous tromper. «Macbeth» est une pièce noire, mais en réalité Shakespeare n’est jamais noir. Et le théâtre ne devrait jamais l’être non plus : il est une activité poétique, donc lumineuse. 

Macbeth par Mnouchkine
Avec Sylvain Jailloux lors d’une répétition de Macbeth (Michèle Laurent)

Le fil des ans – 75 cette année – n’a pas émoussé l’énergie impressionnante d’Ariane Mnouchkine. On a écrit sur cette reine du Soleil et sa ruche des sommes de livres. Elle a toujours un oeil sur tout, et un mot pour chacun. Cette grande dame, qui travaille à la gloire d’un théâtre de service public, n’a pas le temps de se retourner sur la sienne:

Des souvenirs ? Bien sûr, j’en ai. Mais bien moins, au fond, que les anciens du Soleil qui reviennent nous voir, car je suis encore dans la marmite, je vis au présent. Je me dis surtout : qu’est-ce qui reste à construire ? Qu’est-ce qui s’est abîmé ? Y compris dans une toiture… 

La grande force de Mnouchkine, c’est de rester disponible «à la joie des répétitions, à l’émerveillement, à la révélation de certains acteurs. Tout est fait pour ce feu, c’est là où tout commence». Et c’est ainsi que le Théâtre du Soleil entretient la flamme d’un théâtre généreux, à la fois unique et faramineux.

Odile Quirot

Macbeth, de William Shakespeare,
traduction et mise en scène Ariane Mnouchkine avec le Théâtre du Soleil.
A partir du 23 avril, Cartoucherie de Vincennes, Paris-12e ; 01-43- 74-24-08.

Le Théâtre du Soleil en 7 dates

1964. Ariane Mnouchkine fonde le Théâtre du Soleil, société coopérative ouvrière de production, avec Philippe Léotard, Jean-Claude Penchenat, Roberto Moscoso, Françoise Tournafond et Martine Franck.

1970. Création de «1789» au Piccolo Teatro de Milan (384.000 spectateurs, tournée comprise).

1977. Tournage du film «Molière ou la Vie d’un honnête homme».

1981-1984. Années Shakespeare avec «Richard II», «la Nuit des rois» et «Henri IV» (253.000 spectateurs).

1985. «L’Histoire terrible mais inachevée de Norodom Sihanouk, roi du Cambodge», d’Hélène Cixous (108.000 spectateurs).

Note de Christophe Riedel : Spectacle Remonté par Georges Bigot il y a 3 ans : je l’ai alors de nouveau rencontré avec tant de plaisir muet pour un article

1990-1992. Les Atrides avec «Iphigénie à Aulis» d’Euripide et «l’Orestie» d’Eschyle (joués à New York, 287.000 spectateurs).

1999. «Tambours sur la digue», de Cixous (150.000 spectateurs).

Source : « le Nouvel Observateur » du 17 avril 2014.

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Superbe aventure, non ? Un peu maoïste, d’un point de vue structurel, persifla t-on à ma gauche : tout le monde est payé au Smic à égalité, de la femme de ménage au metteur en scène. Ce qui fit dire à ce dernier, Georges B, il y a quelque temps : pas évident pour payer son loyer à Paris… La rançon d’un sens de l’équité rare ?

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