C’est la première fois qu’un binôme père-fils, celui des Meilleur, René et Maxime, obtient en duo 1ère, 2ème puis 3ème, la plus dure des étoiles au Michelin. Plus dure que celle de l’ESF : niveau chamois de l’Himalaya (surtout qu’il n’y en a pas).
Comme l’explique Maxime :
« Avec mon père, c’est comme si on avait atteint le sommet de la montagne, avec devant nous un panorama grandiose. C’est une nouvelle vie qui commence. Avec l’envie d’aller encore plus loin, de délivrer une cuisine enracinée dans notre patrimoine alpin, et de faire découvrir des produits d’exception souvent méconnus ». Dans leur chalet d’hiver…
St-Martin de Belleville, c’est la vallée d’â côté de Courchevel, c’est aussi la station des Menuires, qui fête cette année ( avec temps fort festif le 12 février soir sous le signe chromo-architectonique de Mondrian) ses cinquante ans. Saint-Martin de Belleville, c’est la vallée d’â côté de Courchevel, la Bouitte, c’est chez eux, et ça se mérite au moins une fois dans une vie, quand on peut, une vie un peu nantie comme les nôtres.. Ca se mérite : Normal, ce sont les Meilleur. Après bien des années de désir et de rigueur pour l’obtenir, leur troisième étoile, celle que René voulait tant, aussi pour envisager ensuite de passer la main par la suite à Maxime. Un jour…
Il a aussi crée en 2014 , on en avait parlé (je l’y avais d’ailleurs encouragé lors de ma venue car il hésitait encore à la monter avant cette fameuse troisième étoile) sa seconde table bistronomique sur les pistes, son chalet d’altitude de Chef… L’auréole étoilée devrait irradier cette table… que j’espère bien tester !
J’avais visité les cuisnines flambant neuves, superbes, en open view bien sûr…
Consécration qui leur permet de devenir les ambassadeurs gastronomiques de la Savoie :
La Bouitte devient aussi le plus haut restaurant « 3 étoiles » en France (1500).
Plus bas, on pourra lire mon Carnet de Bouitte… et du Chabichou, vestige de vraies découvertes culinaires en leurs maisons, chic, mais sans esbroufe.
René et Maxime Meilleur, c’est donc le parcours de héros culinaires modestes, autodidactes passionnés, passés maître en l’art de cuisiner et recevoir
dans leur chalet d’hiver et d’été.
j’ai encore en hiver aux pieds
les chaussons moumoutés
d’une de leurs chambres,
en fourrure polaire, touffes douces,
comme il se doit
(pas pour les chambres, pour les chaussons)
Un peu drôles dans le confortable et raffinés:
Uniques, ces chaussons, petite vache dessinée dessus
C’est le logo de La Bouitte qu’on a ainsi sous le pied
A leur image. comme ces chaussures et plaids qu’ils prêtent aux clients du restaurant en terrasse.
A côté de la Cabine de bois de soin sur lit de foin chaud
et du sauna datcha à lucarne donnant sur la montagne
Lucarne où tromper du regard la chaleur
sèche vous embrasant.
Je me souviens que la première fois que j’y ai déjeuné,
j’ai entendu un hélicoptère passer.
J’ai naïvement dit dit à ma voisine,
qui était aussi la puissance invitante, une marque de champagne :
– « Ce sont les secours ? Quelqu’un a du se blesser sur les pistes… »
– Elle, très gentiment : « Non, je crois plutôt qu’il s’agit d’un client arrivant à la Bouitte ». L’idée qu’on arrive ainsi ne m’avait pas effleuré, moi qui n’en suis point si familier, des très belles tables.
C’est un honneur en effet, sourit modestement René, commentant ces arrivées héliportées quand je le revis quelque temps plus tard chez lui, après avoir croisé Maxime à une présentation à Paris…
Je vous remets une partie de mon article ici, le reste à la fin :
A ma gauche, dans la vallée des Belleville, la Bouitte (« petite maison » en patois savoyard), à Saint Martin, tenu par René Meilleur et son fils Maxime. A ma droite, dans celle de Courchevel, passée celle des Menuires, le Chabichou, crée en 1954 par Michel Rochedy.
Il serait vain de les départager à l’arrivée (mais René a gagné). D’autant plus que ces deux chefs depuis belle lurette sont des amis émérites, des duos père et fils d’une remarquable efficacité fusionnelle. Comme me le précise René Meilleur, fondateur de la Bouitte en 1976, doté d’un second macaron en 2008. S’il a en partie passé les rênes à son fils Maxime, il n’est pas près de passer la main. D’autant moins qu’ils sont comme deux doigts de la même.
EEn ce premier juillet, la Bouitte vient de rouvrir, une seule petite Ferrari rouge anglaise est garée devant à l’hôtel, ce qui est tout de m^me plus distingué que moi, venu avec mes chaussons moumoutés depuis Compostelle (faux) un couple d’habitués discrets venus de Grenoble a ouvert le bal. Madame a accepté de manger du lapin et des rognons, qu’elle n’aimait pas jusqu’alors, et les apprécie.
Maxime et René disent que l’expérience de leur table, c’est précisément ça : délaisser les préjugés. Maxime emmène en promenade de découverte fleurie le long du Doron, rivière de la vallée des Belleville, l’une des trois somptueuses « Trois vallées ».
En ce début juillet, le Doron coule à larges flots gris calcaire. Deux escargots de Bourgogne caracolent au bord sur la roche. Maxime, qui a testé la veille en cuisine les nouveaux plats de sa carte d’été, explique comment d’hardis mariages fleuris voient le jour, par exemple avec la Reine des prés, humble fleur blanche de bord de chemin, on passe à côté d’elle sans la voir, à l’arôme de lait d’amandes subtil qu’on goûte au dessert. Les Meilleur l’utilisent en infusion pour le crémeux d’une tarte à l’abricot. Maxime : « Je l’utilise une fois dans un repas, mais pas deux. A Paris, je suis allé dans une grande table où l’on m’a servi de l’asperge à quatre reprises, c’est trop… ». Comme l’émulsion « dont certains abusent encore, oui », aquiesce René, par moi sollicité.
Par contre, leur mise en bouche d’huitre marinée au yuzu (agrume asiatique tendance, goût entre cédrat, pamplemousse et mandarine) est probante. Une fin de bouche iodée vous accompagne longtemps. En particulier, avec Ultra D, un extra brut de la maison Devaux. Qui nous avait initié l’hiver dernier à d’inénarrables dégustations d’altitude à 11 heures, à 2800 et 2400 mètres : La bulle gonfle en raison de l’altitude, le palais se rebiffe, puis approuve. Devaux, situé dans l’aube, en Cote des Barr, proposa surtout à la Bouitte un repas tout champagne raffiné et innovant. Bilan : L’une des 1001 expériences à faire dans une vie, sans conteste.
Suivent à la Bouitte zestes d’orange dans un lait de foie gras et bébé carotte à l’épicéa. Puis queue de homard bleu et son corail, concombre de mer, nimbés d’huile de verveine. René Meilleur montre sa récente table d’hôte en cuisine, tout de bois vêtue, en avancée sur un balcon. Ce chevalier de la table de sapin, vers lequel les hélicoptères atterrissent l’hiver pour de bons repas, a aussi conçu dans son charmant petit Spa une cabine de foin. C’est-à-dire un bain de vapeur.
Allongé sur un lit à rideaux rouges garni de foin « coupé la veille à 1400 mètres au moins ». Fermons les yeux, on pourrait être un faune sylvestre. Après ça, un bon massage californien aux huiles avec des attaques en shiatsu vous remet d’aplomb après la belle randonnée à 2250 mètres sur les Balcons : 7 kilomètres, des Menuires jusqu’à Saint-Marcel, à travers prés et fleurs qu’on apprend à connaître. Retour dans ma chambre. Tiens, un lézard dans mon escalier, une coccinelle sur mon oreiller, c’est encore l’été… Un papillon de nuit m’aura aussi frôlé la paupière gauche à table, autre sensation inédite qui retient l’été…
René
Fils d’ébéniste et de paysan, René acquiert en 1976 (à 26 ans) un champ de pommes de terre à Saint Martin de Belleville. Avec son
épouse Marie-Louise, il y crée de ses mains « La Bouitte », « petite maison » en patois. C’est un coin préservé dans le massif de la Vanoise, aux portes du plus grand domaine du monde : Les 3 vallées. René et Marie-Louise servent à leurs débuts fondues et cuisine de terroir, comme tout le monde ici.
Mais vite, adieu raclette, mais toujours utilisation des bons produits du cru. En 1985, un dîner mémorable chez Paul Bocuse, provoque le déclic. René et Marie-Louise réalisent leur rêve. Passionnés de gastronomie, ils prennent le virage de la haute cuisine. D’un geste de la main désignant la taille de l’assiette, René se souvient qu’au début, des clients renâclaient à accepter les assiettes à portion minimalistes géométrisantes de la nouvelle Cuisine… « Depuis, tout le monde fait ça, mais ce n’était vraiment pas évident alors… »
Le voici lors du Dîner des 50 ans des Menuires, en toute simplicité, au Centre sportif :
Maxime
L’arrivée en 1996 de leur fils Maxime, donne une nouvelle impulsion. Ancien biathlète en équipe de France juniors, il puise ses forces dans les valeurs du sport: rigueur, endurance et dépassement de soi. On en parla pendant une de ces promenades où les Chefs emmènent leurs clients découvrir plantes, fleurs, herbes et la façon de les accommoder… près de la rivière grise charriant encore grandes eaux de début juillet, avant l’accalmie d’août, en contrebas de la Bouitte.
Une famille de bâtisseurs
Sa grande soeur, Sophie, se joint à l’aventure dès 2000, pour créer progressivement 16 chambres et suites, pétries de charme.
Toute la famille (conjoints inclus) va déployer une énergie à déplacer des montagnes, pour construire ce chalet pierre après pierre, année après année, et en faire un repaire unique d’expériences culinaires et oenologiques.
Et voici la suite de mon article :
La Bouitte et le Chabichou
Pleines lunes étoilées à Courchevel
Courchevel la belle fait partie du plus grand domaine skiable au monde, celui des 3 Vallées, pures merveilles de glisse. Il y a aussi un golf 9 trous tout a fait recommandable, notamment en raison de gros rochers à contourner. Qu’on se le dise, si Courchevel est toujours aussi chic, les étalages de signes extérieurs de récente richesse, disons du millénaire précédent, sont à la baisse . « D’ailleurs, les clients connus, les habitués en particulier, paient pour la discrétion et empruntent des portes dérobées quand il le faut » plaide l’office du tourisme, pour qui virage sportif de la station est effectif depuis la Coupe du monde de descente féminine en 2010, un beau succès.
Autre symptôme de ce tournant sportif, les coureurs en montagne ont 5 rendez-vous de pleine lune (jusqu’au 2 octobre) pour une course en nocturne originale, la « Dynafit MOONtain Race de Courchevel ».
Départ 20h30 à Courchevel 1650. Lors de celle du 3 juillet, la presque pleine lune, après s’être laissée désirer, éclairera après l’arrivée, tandis qu’on réchauffait autour d’un brasero et d’une énorme marmite de soupe la centaine de participants, dont votre modeste serviteur : le coureur le plus nul de sa génération.Quelle épreuve au juste l’éprouva tant ? 9 kilomètres de course à pied (rebaptisée trail), 900 mètres de dénivelée négative, jusqu’à un refuge à 2280 mètres au bord du Parc national de la Vanoise, celui du Grand Plan. Une belle itinérance que ce programme là. On commence par une descente caillouteuse, suivie de quelques faux plats, deux plateaux se succédant sur 6 kilomètres. Puis sur d’assez raides pâturages apparaît une constellation de vaches rousses marquant le début de l’ascension finale : 3 kilomètres durant lesquels l’auteur de ces lignes faiblira. Ce ne fut pas le cas de Sébastien, le coach sportif de l’hôtel Chabichou, un chalet blanc très chou (et quatre étoiles) depuis 1962. Durant une marche nordique faite avec lui, il avait estimé qu’il pourrait faire un temps de 55 mn. Et y parvint, le majorant d’une seconde. Le numéro 1 boucla l’affaire en 50 minutes, la première dame en 65 et quelques septuagénaires dynamiques qu’on raccompagna, en 90. Même pas mal !
Autre compétition au sommet, celle des deux chefs de Maisons savoyardes prodigieuses au sein des Trois vallées. Deux établissements de cœur doublement étoilés au Michelin, qui ont une âme, investissent en propre et tissent leur doux cocons restaurateurs et hôteliers, éminemment hospitaliers, dans d’odorants chalets en sapin, avec à table de savoureux pains maison. A ma gauche, dans la vallée des Belleville, la Bouitte (« petite maison » en patois savoyard), à Saint Martin, tenu par René Meilleur et son fils Maxime. A ma droite, dans celle de Courchevel, passée celle des Menuires, le Chabichou, crée en 1954 par Michel Rochedy. Depuis la troisième étoile, La Bouitte mène 3 à 2…
(…)
(deuxième double page)
Un Chabichou si chou
Glissons en compagnie des épicuriens vers le Chabichou : Ce chalet de neuf chambres, racheté en 1962 par Michel Rochedy et son épouse, a été bichonné au fil du temps en deux chalets blancs de 41 chambres. Côté restaurant, Michel Rochedy, qui vient de l’Ardèche, obtient sa première étoile au guide Michelin en 1979, la seconde en 1984. Depuis 1988, il est accompagné en cuisine par Stéphane Buron, Meilleur ouvrier de France 2004, une sorte de fils spirituel. En plus de Nicolas, revenu au pays, devenu guide de haute montagne, qui fait visiter le jardin de 600 M2 devant la piste bleue du Chabichou, nous présente à une fleur de Genépi, si forte en odeur quand on la frotte. Montre l’hysope, une rareté qu’on dégustera en gelée dans le pré dessert.
En 2011 est venu s’y ajouter un spa de 1100 m2. Cet espace sensoriel (comme on disait en ces années manquant parfois de sens) compte, outre l’armement conventionnel (bassin multi tonique, canal de marche, soins signatures du Cha très recommandables) quelques drôleries atypiques : une fontaine de glace tombant en cristaux pour se baptiser le corps en sortant du sauna Banya à la russe (80° contre 75, pouvant monter jusqu’à 100° pour les plus intrépides. Une cabine de douche avec touches à thème (parfums, sons et lumières) allant de l’océan à la brume froide. Ne manquez pas « la tempête » : ca clignote rouge vert, un chaud-froid de tonnerre grondant vous douche tropicalement. Tous les clients sondés plébiscitent cette option ! Il y a aussi une grotte de sel « pour inhaler en 20 minutes l’équivalent d’une journée à la mer. » J’oubliais le bon vieux seau d’eau attaché au plafond, qui remet les idées en place, et une branche de bouleau pour se flageller. Mais seuls les Pays de l’Est apprécient.
Le chef Michel Rochedy, qui fêtera en décembre les 50 ans du Chabichou (et la première année de son bistrot le Chat botté, qui marche du tonnerre) cuisine en duo depuis 25 ans avec Stéphane Buron, meilleur ouvrier de France 2004, son fils spirituel en cuisine. Exemple, l’omble chevalier du lac Léman, en tartare aux langues d’un caviar osciètre solognot. Stéphane Buron, tout en nous montrant sa tablée d’hôte en cuisine (oui, Chabichou et Bouitte en sont dotées, tout comme d’une vue sur cave à vins en transparence de puis le plancher à l’entrée de leur table gastronomique) raconte qu’il se fournit en caviar auprès d’une adresse parisienne secrète : Un hangar sans enseigne, par sécurité totalement banalisé, que lui a donnée le chef cuisinier de l’Elysée. Suivent une barre de foie gras aux topinambours, un pigeon de Bresse rôti au jus de grenade, joli navet braisé au safran.
Résultat des courses : un même engouement pour la Bouitte et le Chabichou, nos deux chefs de 3 mirifiques vallées. Une cuisine inventive ancrée dans un terroir auquel ils sont attachés, complexe mais débarrassée de tout artifice inutile. Comme Courchevel ?
Christophe Riedel
Les hôtels Restaurants étoilés (et leurs stages de cuisine) :
la-bouitte.com
chabichou-courchevel.com
La station et la course :
courchevel.com/moontain
(de juin à octobre, autour de la nuit de pleine lune).
Les dégustations au sommet : champagne-devaux.com
Merci pour tous ces compliments cher Monsieur, à très bientôt à LA BOUITTE
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