Bien avant les peopleries reines des pommes du XXIe siècle, Le Corbusier était bien aussi. En été, en star shootée à Roquebrune Cap Martin (au-dessus de Menton), près de son cabanon jadis complètement accessible, aujourd’hui muraillée, fermée, mais visitable sur demande auprès de l’office de tourisme de Roquebrune. et qui va rouvir en mai 2015.
L’architecte si reconnu, sacralisé, désacralisé à l’heure du sacre cinquantenaire, un peu décrié pour ses prises de position douteuses pendant les années vingt et trente (ce qui, selon certains, joue en sa défaveur pour un classement Unesco global et transnational de son oeuvre) alla peindre sur le nu chez Eileen Gray’s, à la villa Villa E-1027
Un poil plus haut que son cabanon sur le chemin des douaniers longeant en falaise la mer
Mer qui, plus tard, lui fut hélas fatale si ce n’est foetale…
Eileen Gray’s Villa E-1027
Il paraît qu’il entretenait avec Eileen des relations ambivalentes, qu’il aurait peint certaines fresques dans sa villa sans lui demander vraiment son avis et que, d’une certaine façon, il ne lui accorda pas assez de reconnaissance.
Mais je ne sais rien de cela, ne fait que rapporter ce que l’on m’a dit, à la façon d’un… journaliste !
La Villa E-1027 ne se visite pas, les fresques peintes sont abîmées, à peine visibles, elle est vraiment en déshérence hélas, fermée et entièrement vidée des objets restants en raison de vols répétés, me racontait il y a peu Sophie B, attachée de presse de la Région Côte d’Azur.
ue cela était tendu ! Délassons-nous maintenant en partant à Roquebrune Menton, du côté du Cabanon enfin restauré début 2015, après tant de fois passé devant en déshérence. Il se trouve sur la falaise rocheuse, 100 mètres en-dessous de la maison de mon oncle/figure du père disparu, reconstituée avec de vrais morceaux d’un amour quasiment filial (Manfred).
Il (le cabanaon, pas Manfred) ouvrira en bonne et due forme à partir de mai. Le Châtelier de Télérama mord son chapô : bien tape à l’oeil, il insiste en intro sur la bétonisation de la Côte pour faire plus authentique. Après, l’article est très instructif, point hâtif. Cesse d’être tiré par les chevaux du désir éditorialiste.
Du Cabanon à la Villa E 1027
a Côte d’Azur, là-bas entre la vision dantesque de Monaco hérissée sur la mer et les douceurs retraitées de Menton, donne à certains, allez savoir pourquoi, des nostalgies de Bretagne ou d’Ecosse ! Impossible par ici de trouver plus de cent mètres de nature d’un seul tenant, sans maisons, immeubles, marinas les pieds dans l’eau. Sauf qu’en cherchant bien…
Corbu fut de ceux-là, qui se dégotta sur les rochers, à l’écart de la route, en dessous de la voie ferrée qui court le littoral, un petit lopin pour y planter son « château de vacances ». 3,66 m de côté sur 2,66 sous plafond. Une boîte minimum, calculée au Modulor qui fut, en quelque sorte, sa dernière demeure.

© Fondation Le Corbusier, ADAGP, 2015 (gauche) et Photo Olivier Martin-Gambier 2006 © Fondation Le Corbusier, ADAGP 2015
C’est sur la plage en contrebas qu’il est mort d’une crise cardiaque, le 27 août 1965, rendant du même coup célèbre un certain certain Henry Pessar, paparazzo amateur, auteur de l’ultime portrait du maître.

Mais qui est l’homme derrière ?
Photo Henry Pessar
De fait, Corbu, sur la Riviera, était un peu un squatteur. Notamment chez ses amis architectes et décorateurs (avec qui, comme toujours, il finira par se fâcher) Eileen Gray et Jean Badovici qui, à cet endroit même s’étaient construit la villa E1027 (E pour Eileen, 10, pour le J de Jean, comme 10e lettre de l’alphabet, 2 pour le B de Badovici, 7 pour le G de Gray). Une élégante construction qui respectait peu ou prou les « 5 points de l’architecture moderne » (Pilotis, plan libre, fenêtre en longueur, façade libre, toit terrasse) édictés par maître Corbu.

La villa E1027
Photo Luc Le Chatelier
Juste derrière, il y avait l’Etoile de mer, le bistrot de Thomas Rebutato, qui, en échange du terrain sur lequel Le Corbusier pu construire son cabanon, lui demandèrent d’installer, sur l’un de leur terrain de boules, cinq « unités de camping » de grandeur conforme : c’est à dire minimum.

Photo Luc Le Chatelier © Fondation Le Corbusier/ADAGP 2015
Aujourd’hui muséifiés, la Villa E1027, le cabanon et les unités de camping, propriétés du Conservatoire du littoral, sont gérés par l’office du tourisme de Roquebrune-Cap-Martin
On dirait le sud… et ses escadrons de voleurs incessants, s’en prenant à toute maison isolée. Dommage pour ce lieu auquel on souhaitait un avenir plus dignement patrimonial. Et bien c’est chose faite !
Signalons à propos du Corbu cette non moins prometteuse actualité en sa fondation parisienne :
Autre bonus en la rue du Docteur Blanche abritant une autre belle Maison- Fondation Le Corbusier, la villa Roche : Justement, une expo jusqu’au 31 janvier y présente les photos de Lucien Hervé sur le Cabanon du Corbusier à Roquebrune Cap Martin, où il finit ses jours, non plus les pieds, mais la tête dans l’eau. On la visitera volontiers quand faire se pourra, une l’été indien passé, la pluie (cinglant le réel de la résignation à l’hiver) revenue…
Même si cette année, la douceur persista jusqu’à fin novembre : Bigre, il y aurait anguille climatique sous roche ? Cela tombe bien, l’exposition s’appelle : les Vacances.
Mise à jour 04/15 :
L’Architecture à l’honneur
Avec la réouverture, à partir de mai 2015, à Roquebrune Cap Martin des sites : Eileen Gray – Etoile de Mer – Le Corbusier.
Aujourd’hui propriété du Conservatoire du littoral, le site Eileen Gray / L’Étoile de Mer / Le Corbusier au Cap-Martin géré par « Cap Moderne » réunira sur 2970 m2 un ensemble d’oeuvres mondialement reconnues.
Lucien Hervé : Les vacances de Monsieur Le Corbusier
Photo : Lucien Hervé, Le Corbusier devant le cabanon, Cap Martin – Roquebrune 1951
© FLC-ADAGP / Lucien Hervé / J. Paul Getty Trust
Détails ci-dessous
et ce joli billet citant le site de la Fondation du Corbu :
Lucien Hervé : Les vacances de Monsieur Le Corbusier
Fondation Le Corbusier, Paris
Jusqu’au 30 janvier 2015
Dans le cadre du« Mois de la Photo à Paris »
En partenariat avec l’Association des Amis de Lucien et Rodolf Hervé
« Le Corbusier travaille. Il est en vacances au Cap-Martin où il a construit son Cabanon (3,66 x 3,36 x 2,26) au bord de l’eau. Le Corbusier dessine, écrit, déjeune avec Yvonne, son épouse, plaisante avec Thomas Rebutato, son voisin, propriétaire de la guinguette l’Étoile de mer. La mer à quelques mètres. Elle l’attend pour son bain quotidien, cette Méditerranée qu’il a toujours admirée, aimée et qui l’accompagnera dans son dernier voyage. Hervé travaille. Il réalise quelques clichés de Corbu dans l’intimité. Il fixe ces rares moments où le crayon s’arrête, où l’esprit se repose, où le plaisir de l’eau l’emporte.
Une trentaine de photographies réalisées par Lucien Hervé au cours des années cinquante sont présentées dans la Maison La Roche, siège de la Fondation Le Corbusier à Paris ; quelques dessins originaux de Le Corbusier représentant le site du Cabanon de Roquebrune-Cap-Martin complètent cette évocation de sa résidence d’été.
Le révérend père Couturier, directeur de la revue l’Art sacré, fut à l’origine de la rencontre entre Lucien Hervé et Le Corbusier. Après avoir recommandé Lucien Hervé auprès de Matisse, puis auprès de Fernand Léger, il encouragea le photographe à se rendre à Marseille pour y photographier le chantier de l’Unité d’habitation. À la fin du mois de novembre 1949, Lucien Hervé réalisera en une seule journée plus de six cent clichés de l’œuvre monumentale avec son Rolleiflex.
Le Corbusier à qui il avait fait parvenir son reportage est enthousiasmé par son travail. Il décide alors de l’engager pour photographier ses œuvres, aussi bien architecturales que plastiques. Hervé travaillera pour Le Corbusier de 1950 à 1965 et réalisera plus de 20 000 clichés constituant ainsi une documentation de première main sur l’œuvre architecturale – livrée au commanditaire sous forme de contacts recadrés et collés sur des planches de classeurs – représentant aussi bien des reportages sur des chantiers en cours (Chapelle Notre-Dame du Haut de Ronchamp, Unité d’habitation de Rezé-les-Nantes, Usine Claude et Duval à Saint-Dié, Secrétariat,Assemblée et Palais de Justice de Chandigarh (Penjab, Inde), Palais de Filateurs à Ahmedabad (Gujarat, Inde), etc., y compris des clichés des maquettes des œuvres in situ…) que des réalisations antérieures pour lesquelles Le Corbusier souhaitait mettre à jour l’iconographie (Villa Savoye à Poissy, Cité de Refuge de l’Armée du Salut à Paris).
Hervé se verra ensuite confier la couverture photographique de l’œuvre plastique de Le Corbusier : peintures et sculptures, carnets de dessins, gravures, etc. Il réalisera également des portraits dans l’immeuble de la rue Nungesser et Coli : l’artiste au travail dans son atelier, images de Le Corbusier et d’Yvonne dans l’intimité de l’appartement. Un séjour dans le cadre exceptionnel du Cap-Martin sera également l’occasion de produire une série de clichés de vacances qui demeurent l’un des rares témoignages de la vie chaque été au Cabanon. Ces portraits témoignent de la grande proximité entre les deux hommes et de cette relation exceptionnelle entre les deux artistes qui dura plus de quinze ans.
Chacun viendra puiser chez l’autre les éléments qui viendront enrichir son travail. Ils sont tous les deux habitués à transgresser les contraintes exercées parleurs pratiques respectives. L’architecte doit faire avec le terrain, le programme, le client, l’économie… Le photographe sait s’adapter à la demande,au climat, aux moyens, à la technique. Ils partagent une même approche formelle de la photographie – Le Corbusier l’a pratiquée en plusieurs occasions et il en a nourri ses créations – l’image originale est un matériau transformable, le document devient vite méconnaissable au bénéfice d’un pur objet plastique. L’usage qu’ils lui assignent sera cependant divergent, pour l’architecte, il s’agit de mettre en œuvre un outil de communication efficace tandis que le photographe cherche à approfondir sa pratique plasticienne. Il construit des images dont le cadre et la composition s’inspirent des formes épurées,rigoureuses et lyriques des bâtiments qu’il capte, les réinterprétant ensuite jusqu’à l’abstraction.
Le travail d’Hervé contribua largement à la diffusion et à la connaissance de l’œuvre de Le Corbusier, celui-ci puisant abondamment dans ces ressources pour illustrer les volumes de son Œuvre complète pour réaliser le livre culte sur Ronchamp ou encore le testament intellectuel de L’Atelier de la recherche patiente. Il les confiera aussi très souvent aux revues et aux magazines qui le sollicitent pour des articles… »
Mise à jour 04/2015 :
Site Eileen Gray – Etoile de Mer – Le Corbusier – Roquebrune Cap Martin
Le site sera ouvert au public à partir de mai 2015.
Présentation et historique du site :
Dans l’entre-deux guerres, Eileen Gray expérimente une nouvelle architecture sur un site naturel remarquable dominant la baie de Roquebrune-Cap-Martin au coeur du paysage méditerranéen. Tout commence en 1926. La créatrice irlandaise Eileen Gray (1878-1976) construit, avec son compagnon, l’architecte Jean Badovici, une maison qu’elle partagera un temps avec lui, qui en restera propriétaire jusqu’à sa mort en 1956. Baptisée E-1027 (E pour Eileen, 10 pour le J de Jean, 2 du B de Badovici et 7 du G de Gray), cette villa sur pilotis arrimée à des restanques est la première réalisation architecturale d’Eileen Gray. Elle en dessina les plans et le mobilier pendant trois ans, entre 1926 et 1929. Dès les années 1930, Le Corbusier et son épouse Yvonne, d’origine monégasque, s’y rendent à plusieurs reprises. Durant l’été 1939, après le départ d’Eileen Gray, l’architecte demande à Badovici s’il peut y séjourner pour profiter du soleil et de la mer, mais aussi pour peindre directement sur les murs de la villa. Il réalise alors sept peintures murales à l’intérieur de la villa et deux autres à l’extérieur, ces dernières détruites par lui-même vers 1958. Eileen Gray l’accusera d’attenter à l’intégrité de son oeuvre.
En 1949, toujours amoureux du site, Le Corbusier vient y travailler avec ses collaborateurs et des confrères et se lie d’amitié avec Thomas Rebutato propriétaire de l’Étoile de Mer. Cette petite guinguette ne tarde pas à devenir la « cantine » du groupe. En 1952, désireux de posséder sur le site un établissement plus durable, il construit son propre cabanon. « J’ai un château sur la Côte d’Azur, qui a 3,66 mètres par 3,66 mètres. C’est pour ma femme, c’est extravagant de confort, de gentillesses », dit Le Corbusier de ce prototype d’un habitat minimal qui jouxte L’Étoile de mer.
Cinq ans plus tard, pour payer la parcelle de terrain du cabanon sur laquelle il envisage également un projet pour cinq habitations minimales de vacances, qui ne verront jamais le jour, il dessinera et construira à ses frais pour Thomas Rebutato cinq unités de camping. Aujourd’hui propriété du Conservatoire du littoral, le site Eileen Gray / L’Étoile de Mer / Le Corbusier au Cap-Martin géré par Cap Moderne réunit sur 2970 m2 un ensemble d’oeuvres mondialement reconnues.
A savoir : Cap Moderne
Depuis 2014, l’Association Cap Moderne est chargée par le Conservatoire du littoral de la mise en valeur et de la gestion touristique, culturelle et commerciale du site Eileen Gray – Etoile de Mer – Le Corbusier situé sur la commune de Roquebrune-Cap-Martin. Dans ce cadre, l’Association Cap Moderne veille à la protection et à l’entretien du site, de ses bâtiments et des oeuvres attachées ; et assure la maîtrise d’ouvrage des aménagements et travaux induits par la mise en valeur du site ; assure l’accès et l’ouverture au public et l’animation culturelle de ce site dans les limites compatibles avec sa conservation écologique, paysagère et patrimoniale. http://www.capmoderne.com
L’info cinéma en plus :
Film « The Price Of Désire » sur la relation entre Eileen Gray, Le Corbusier et Jean Badovici et Tourné à Roquebrune cap Martin – Sortie prévue en 2015
EXPOSITIONS
Centre International d’Art Contemporain, Carros Village – Mai à septembre 2015
REGARDER OBSERVER VOIR IMAGINER INVENTER CRÉER – VARIATIONS LE CORBUSIER
Musée Picasso, Antibes – 14 novembre 2015 au 24 janvier 2016
« Le Corbusier. Le dessin est le témoin »
ROQUEBRUNE-CAP-MARTIN, vieux-village – 27 août à fin septembre 2015
Les vacances de Monsieur Le Corbusier – 27 Photos de Lucien Hervé
This wass a lovely blog post
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Thanks Jada, yes in deed… Corbu days…
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